Main basse sur le vivant

En dépit des promesses, le gouvernement s’apprête à appliquer une loi de la droite sur le brevetage des semences.

Claude-Marie Vadrot  • 4 avril 2013 abonné·es

Depuis des années, les multinationales agro-industrielles françaises, allemandes ou américaines se battent, par lobbies et partis politiques interposés, pour obtenir le contrôle parfait des semences qu’elles vendent aux agriculteurs et, dans une moindre mesure, aux jardiniers amateurs. Cela passe d’abord par la fourniture d’hybrides dites F1, dont les graines, lorsqu’elles sont de nouveau semées, ne peuvent pas reproduire à l’identique la plante d’origine. La seconde méthode, plus radicale, consiste à faire interdire l’utilisation de semences récoltées en les protégeant par un brevet qui induit le versement d’une sorte de « droit d’auteur », y compris s’il s’agit d’une utilisation non commerciale.

Au mois de décembre 2011, la majorité de Nicolas Sarkozy a adopté une proposition de loi confortant ce brevetage du vivant. Le texte sanctionne la réutilisation par un paysan, voire par un jardinier amateur, des graines récoltées sur une exploitation ou dans un potager si elles font l’objet d’une protection commerciale. La loi avait été proposée par Christian Demuynck, alors sénateur UMP de la Seine-Saint-Denis et membre de la Commission des affaires… culturelles du Sénat. Pendant la campagne électorale, le Parti socialiste, qui s’était opposé à la loi, et le candidat François Hollande avaient promis d’abroger ce texte. Or, non seulement aucune procédure d’annulation de la loi n’a été menée à bien, mais les pressions du Groupement national interprofessionnel des semences (Gnis) semblent avoir abouti à un résultat inverse. Cet organisme, qui regroupe la plupart des semenciers français ou ceux opérant en France, lesquels réalisent un chiffre d’affaires annuel de près de 2 milliards d’euros, a obtenu que son ministère de tutelle prépare des décrets d’application de la loi. Ceux-ci devraient voir le jour d’ici quelques mois, en dépit des dissensions qui agitent le ministère de l’Agriculture. Et malgré les protestations de la Confédération paysanne, des écologistes et d’associations de préservation de la biodiversité agricole comme Kokopelli. Laquelle a déjà dû, à plusieurs reprises, affronter le Gnis devant les tribunaux.

Écologie
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

À Nîmes, l’écologie populaire s’empare du logement
Reportage 9 juillet 2025 abonné·es

À Nîmes, l’écologie populaire s’empare du logement

Dans cette ville du Gard violemment touchée par les canicules, l’habitat « bouilloire » fait les premières victimes de ces vagues de chaleur d’une intensité croissante. Une thématique au cœur du festival les Vers du Ter-Ter.
Par Embarek Foufa
Loi Duplomb : la FNSEA contre la société
Analyse 8 juillet 2025

Loi Duplomb : la FNSEA contre la société

Ce 8 juillet, les parlementaires doivent voter la proposition de loi du sénateur de droite proche de la FNSEA contenant de nombreux reculs écologiques et sanitaires. Ces derniers jours, les oppositions à ce texte ont fleuri de partout, témoignant d’une mobilisation massive et éclectique.
Par Pierre Jequier-Zalc
« Les députés qui voteront pour la loi Duplomb voteront pour le cancer »
Entretien 7 juillet 2025 abonné·es

« Les députés qui voteront pour la loi Duplomb voteront pour le cancer »

Porte-parole de l’association Avenir Santé Environnement, Franck Rinchet-Girollet est le père d’un enfant de 8 ans en rémission d’un cancer. Il exhorte les députés à voter contre la très contestée loi Duplomb, votée mardi 8 juillet à l’Assemblée nationale.
Par Pierre Jequier-Zalc
Loi Duplomb : comment le gouvernement éteint les voix paysannes
Décryptage 30 juin 2025 abonné·es

Loi Duplomb : comment le gouvernement éteint les voix paysannes

La « loi Duplomb » est discutée en commission mixte paritaire à partir de ce lundi 30 juin. Le texte ne bénéficiera qu’à une poignée de gros agriculteurs et invisibilise celles et ceux qui défendent une agriculture paysanne et vertueuse.
Par Vanina Delmas