Livret A : le gouvernement régale les banques

Le gouvernement a décidé de donner 30 milliards d’euros aux banques, prélevés sur le produit du livret A. La somme, qui est censée permettre le financement des PME, ne bénéficiera donc pas au logement social.

Maxence Kagni  • 24 juillet 2013
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Livret A : le gouvernement régale les banques
© Photo : MARTIN BUREAU / AFP

**Le livret A victime du « Hold-up de l’été ». C’est par ces mots que les sénateurs communistes (CRC) ont dénoncé mardi 23 juillet la décision du gouvernement – effective à la fin du mois – de mettre *« à disposition » des banques 30 milliards d’euros issus de l’épargne réglementée. La somme, initialement centralisée à la Caisse des dépôts, provient donc du livret A mais aussi du livret de développement durable. Dès cet automne, 20 milliards d’euros supplémentaires pourraient être distribués selon le journal Les Echos.

«Harro sur le livret A»

Dans un communiqué, le ministre de l’Économie, Pierre Moscovici, a affirmé que ces ressources supplémentaires permettront aux banques de financer davantage l’économie, et notamment les petites et moyennes entreprises. Une justification qui ne convainc pas du tout les communistes, selon qui les banques disposent déjà des fonds nécessaires. Le groupe CRC assure que l’actif bancaire de la BNP est de 1 900 milliards d’euros, tandis que celui de la Société générale est de 1250 milliards et celui du Crédit agricole de 1 840 milliards.

L’association Droit au logement (DAL) critique également la mesure, parlant d’un « cadeau (…) accordé aux banques par le Gouvernement sur le dos (…) de l’intérêt général et des épargnants, pour permettre de spéculer sur les marchés financiers » . La décision est d’autant plus contestable que le livret A sert à financer le logement social. Le groupe communiste au Sénat estime que ce placement populaire doit rester un outil destiné à profiter à ce dernier ainsi qu’à favoriser « la transition écologique, (le) développement social urbain, (…) l’égalité des territoires » .

Des promesses non tenues

La mise à disposition de 30 milliards d’euros au profit des banques intervient alors que le livret A rapporte moins aux épargnants. Au 1er août, son taux sera de 1,25 %, son plus bas niveau historique. En février dernier, il était déjà passé de 2,25 à 1,75 %. Dans son communiqué, le DAL assure que malgré l’objectif affiché par le gouvernement de favoriser la construction de logements sociaux, cet abaissement a pour réel but de forcer les Français à se « tourner vers les produits financier privés » , plus lucratifs. La CGT ajoute que ce changement aura pour conséquence d’accentuer la baisse du pouvoir d’achat de certains ménages.

Le scepticisme a aussi gagné ATTAC, qui a critiqué très durement l’invitation de représentants du secteur bancaire français à l’Élysée, le 19 juillet dernier. Dans un communiqué nommé « Avec François Hollande, régalons la finance » , le mouvement altermondialiste moque les promesses non tenues par François Hollande, pourtant prononcées lors de son fameux discours du Bourget : « les chroniques de l »affrontement’ entre [le Président] et la finance se résument à une succession de reculades, de pantalonnades en volte-face (…). » Les tractations autour du livret A font donc partie d’un ensemble toujours plus large de renoncements. C’est ainsi que la prochaine grande réforme du Gouvernement, celle des retraites, bénéficiera avant tout aux fonds de pension.

Économie
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