Deux nouveaux candidats déçus du Front national

Michel Soudais  • 25 novembre 2013 abonné·es
Deux nouveaux candidats déçus du Front national

Cela commence à ressembler à une épidémie. Dimanche, Arnaud Cléré, un agriculteur de 35 ans de la vallée de la Bresle (Somme) a annoncé son retour au bercail UMP après un flirt de quelques mois avec le FN.

j’ai demandé ma réintégration a l’UMP. J’ai commis l’erreur de m’allier avec un parti non républicain,sectaire et dictateur qu’est le FN.

— Cléré Arnaud (@ClereClr) 24 Novembre 2013

En mai dernier, ce militant de l’UMP avait décidé de s’allier avec le FN pour bouter «l’équipe socialo-communiste» au pouvoir depuis 30 ans à Gamaches. Exclu du parti de droite, il s’était rapproché du SIEL[^2], le micro parti de Paul-Marie Coûteaux, associé au FN, qui présente ses candidats sous l’étiquette Rassemblement bleu marine (RBM).
Là, il affirme aujourd’hui à Rue89 avoir vu «des tatouages de croix gammées sur deux ou trois personnes» , lors d’une réunion des têtes de liste et de quelques colistiers du nord de la France, mi-octobre, à Hénin-Beaumont. Il raconte également avoir «été choqué par les propos homophobes et xénophobes des militants» [^3].

Ce lundi, c’est au tour d’Anna Rosso-Roig , une autre recrue du FN médiatisée en mai dernier, d’annoncer dans Libération que son espoir naïf d’un FN moins «brutal» a été douché.
Anna Rosso-Roig, avant d’être reconnue par hasard par un photographe, comme le prétend sur son blog le correspondant de Libération à Marseille[^4], avait été présentée à la caméra de France 3 PACA, le 16 février 2013, par la com’ du FN à l’occasion d’un déjeuner-débat de Marine Le Pen à Aix-en-Provence. Elle y racontait sans grande explication qu’elle avait décidé au cours de l’été de rejoindre le Front national, après avoir été candidate pour le Front de gauche en juin.


Marine Le Pen à Aix en Provence le 16/02/2013 par bucch

Au début du mois, Nadia Portheault , une candidate d’origine algérienne investie à Saint-Alban (Haute-Garonne) avait déjà quitté le FN après en avoir découvert la vraie nature.
Lire > Une candidate FN découvre la nature de son parti…
et démissionne

Ces trois déçus ont un point commun , malgré des parcours différents. Tous font état, au sortir de leur expérience, d’ « un décalage entre le discours de Marine [Le Pen] et celui de la base militante » , entre ce que Nadia Portheault appelait « la vitrine et une arrière-boutique» peu ragoutante. «Quand on voit Marine Le Pen à la télévision, on ne peut pas imaginer à quoi ressemble l’arrière-boutique» , explique Arnaud Cléré à Rue89. Ce que confirme, pour Marseille, Anna Rosso-Roig:

«Avec toute la stratégie de communication qu’ils avaient mise en place, des gens comme moi ont eu l’espoir qu’ils enlèvent ce côté brutal, cette radicalité du Front national.»

Que ces militants s’y soient laissés prendre est certes imputable à leur naïveté ou à une certaine inculture politique. Mais pas seulement. Si ce qu’ils appellent «la vitrine» du FN a pu leur paraître attrayante, c’est aussi en raison de l’image qu’en donnent trop de nos confrères et consœurs.

Lire > Front national : Les médias complices ?


[^2]: Souveraineté indépendance et liberté.

[^3]: L’annonce du départ d’Arnaud Cléré du FN ayant été faite par le président de l’UMP, Jean-François Copé, lors de son passage au Grand rendez-vous d’Europe 1, dimanche matin, le secrétaire général du FN dénonce une «manœuvre» et un «plan comm de Copé» . Il a aussi annoncé son intention de poursuivre en justice Arnaud Cléré pour ses «propos diffamatoires» . «Nous tenons à la disposition des journalistes les photographies des 130 têtes de listes présentes lors de la réunion interne d’Hénin-Beaumont , écrit M. Briois dans un communiqué. Évidemment aucune personne n’a de tatouage nazi.» On doute toutefois que ces photos présentent les candidats dans le plus simple appareil, le seul qui permette de vérifier la nature d’éventuels tatouages…

[^4]: A la suite de cette «découverte», son parcours, raconté sur le site Marsactu, avait donné lieu à de nombreux articles de presse.