Burkina Faso : Une transition démocratique

Après la révolution qui a chassé Blaise Compaoré, les militaires ont accepté de céder le pouvoir aux civils.

Denis Sieffert  • 20 novembre 2014 abonné·es

Les exemples ne sont pas si fréquents sur le continent africain. Mais il semble bien que le Burkina Faso ait choisi la voie d’une vraie transition démocratique après le soulèvement qui a chassé du pouvoir l’homme qui le détenait depuis vingt-sept ans, Blaise Compaoré. Après trois semaines de transition militaire, le lieutenant-colonel Zida a finalement accepté de céder le pouvoir à un civil. Pour un temps au moins, le risque de coup d’État militaire semble écarté. Il n’a fallu qu’une nuit de tractations à un « collège de désignation » pour s’accorder sur le nom de Michel Kafando, promu chef d’État intérimaire. L’annonce a été faite en présence des deux autres candidats, une ex-ministre de Thomas Sankara, le Président assassiné en octobre 1987, et un journaliste. Le chef de file de l’opposition à Compaoré, Zéphirin Diabré, s’est immédiatement félicité du programme de Michel Kafando, centré « sur les problèmes de corruption et d’impunité » .

Le nouveau chef de l’État intérimaire est un diplomate de 72 ans, ancien ambassadeur de la Haute-Volta (l’ancien nom hérité de la période coloniale) en 1981 et 1982, puis du Burkina Faso auprès des Nations unies entre 1998 et 2011. Un personnage inoxydable qui a traversé trois régimes, mais qui a une réputation d’intégrité et de modération qui l’a évidemment servi dans un contexte de corruption généralisée. Une charte a été adoptée qui stipule que le pouvoir doit revenir aux civils. Plusieurs voix se sont également élevées pour proposer que la voie ouverte par le Burkina Faso serve d’exemple aux autres pays africains, notamment en généralisant la limitation des mandats présidentiels. On se souvient que c’est la tentative de Blaise Compaoré de remettre en cause cette règle pour entamer un nouveau mandat qui avait provoqué le soulèvement populaire entraînant sa chute. Mais on sait qu’il n’y a pas de démocratie véritable dans la misère et l’injustice sociale. Or, le Burkina Faso, 15 millions d’habitants, indépendant depuis 1960 après 64 ans de domination coloniale française, reste l’un des dix pays les moins développés au monde. Si l’on en juge par l’indice de développement humain, il apparaît au 183e rang sur 187 pays classés. L’espérance de vie y est inférieure à 53 ans pour les hommes, et à 57 ans pour les femmes. Le tiers de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté. Là sont les vrais défis pour le nouveau Président et pour celui qui lui succédera, après l’organisation d’élections qui doivent intervenir au plus tard dans un an.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes