Vinci s’enlise un peu plus dans l’affaire Paris-Diderot

Les permis de construire de l’université Paris-VII-Diderot ont été annulés pour la seconde fois. Vinci avait sciemment ignoré les normes de sécurité.

Erwan Manac'h  • 11 juin 2015
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Vinci s’enlise un peu plus dans l’affaire Paris-Diderot

Vinci était passé outre les alertes répétées, les recours en justice et une première annulation en décembre 2013 des permis de construire et des autorisations d’ouverture. Dans le chantier d’extension de l’université Paris-VII Diderot, mené entre 2009 et 2012 en partenariat public-privé (PPP), la multinationale française a rogné sur les normes de sécurité pour réduire ses coûts.

C’était sans compter sur l’obstination d’un ancien architecte du projet et de 3 associations[^2] qui ont multiplié les recours avant même le début des travaux. Ces dernières ont obtenu le 2 juillet 2013 une annulation des permis de construire et des autorisations d’ouverture pour deux des trois bâtiments, alors qu’ils accueillaient déjà du public.

Lire > Paris-VII : le fiasco qui met Vinci à nu
En décembre 2013, la préfecture de police avait couvert ces manquements en publiant des nouveaux permis et autorisations prévoyant des « dérogations ».


Ces dérogations ont été jugées illégales mardi 9 juin par le tribunal administratif de Paris qui a annulé pour la seconde fois les permis de construire et autorisations d’ouverture de deux des trois bâtiments (Sophie-Germain et Olympe-de-Gouges) construits par Vinci via sa filiale Udicité.

Les normes incendie n’ont pas été respectées, en particulier concernant les voies d’accès pour les pompiers. Le tribunal estime aussi, fait nouveau, que le plan local d’urbanisme n’a pas été respecté par le constructeur en ce qui concerne les locaux à vélos, absent dans un bâtiment et trop exigu dans un autre.

Les charges que peuvent supporter les bâtiments sont également insuffisantes du point de vue de la loi, car le tribunal considère que les bâtiments reçoivent du public, comme le prévoyaient les projets initiaux. À l’issue des travaux, l’université et le constructeur avaient classé les étages supérieurs comme des étages de bureaux, ne recevant pas de public, malgré la présence de secrétariats, salles de séminaire et bibliothèque de recherche, pour ne pas se soumettre aux normes de bâtiments recevant du public. Une « présentation juridiquement erronée » , tranche le tribunal.

«Violations de la loi motivées par des intérêts privés »

La cour demande donc des « mesures réellement compensatoires » avant le 15 septembre 2015.

L’association Diderot transparence, qui épluche le complexe dossier depuis le début de cette affaire, a réagi jeudi en demandant « au gouvernement et au préfet de police de cesser d’apporter leur soutien à des violations de la loi uniquement motivées par des intérêts privés ».

Rappelons que Vinci avait pris quelques précautions :
Trois mois après le dépôt des requêtes, le 21 septembre 2010, la multinationale a fait voter par le CA de l’université un avenant au contrat de partenariat faisant peser sur l’université le coût des retards de construction, en cas d’annulation des permis de construire. Paris-VII s’engage à payer les travaux hypothétiques de mise aux normes, voire de démolition, au-delà d’une franchise de 500 000 euros acquittée par Vinci.
Extrait de notre enquête Paris-VII : le fiasco qui met Vinci à nu (février 2014).

[^2]: Diderot transparence, Treize écolo, Solidaires étudiant

Économie
Temps de lecture : 3 minutes
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