Canada: l’État d’Alberta brûle depuis une semaine !

Depuis 8 jours un violent incendie précipite des dizaines de milliers de personnes sur les routes et détruit des dizaines de milliers d’hectares de forêt dans une région déjà ravagée par l’exploitation des sables bitumineux. Une catastrophe économique et écologique sans précédent au Canada.

Claude-Marie Vadrot  • 5 mai 2016
Partager :
Canada: l’État d’Alberta brûle depuis une semaine !
© Photo: Un nuage de fumée enveloppe l'Alberta Highway 63, près de Fort McMurray, le 3 mai 2016 (CITIZENSIDE/JOSHUA BROPHY).

L’incendie qui a commencé dimanche premier mai avait déjà brûlé une centaine de milliers hectares de forêt de l’Alberta samedi soir. Les pompiers canadiens qui tentent de le maîtriser le déclaraient toujours incontrôlable alors qu’il a atteint de nombreuses rues de la ville de Fort McMurray, cité qui se trouve au centre de la zone où sont exploités les sables bitumineux qui font la richesse de cette région et le désespoir des écologistes canadiens.

Une grande ville en feu

Dans la journée de mercredi dernier, les autorités ont donc ordonné et tenté d’organiser l’évacuation complète des 100.000 habitants, dont les 80.000 de Fort McMurray, qui vivent dans la région. Pour qu’ils puissent échapper à une catastrophe qui a déjà détruit plusieurs centaines de maisons et provoqué l’explosion des stations service qui jalonnent l’autoroute 63, la seule route qui relie cette cité à la capitale Edmonton qui se trouve à 440 kilomètres au sud-ouest de la zone en flammes.

L’incendie a déjà ravagé, sans pour l’instant avoir fait de victimes, l’essentiel de la petite ville de Lac La Biche: ses 2.500 habitants ont été totalement évacué dès mardi, avant que la plupart des maisons en bois soient carbonisées par le front du feu. Un feu qui consume déjà également les faubourgs de Fort McMurray marqués mercredi soir par des nombreuses explosions dont les débris retombent parfois sur les voitures s’enfuyant vers la capitale de l’État. Avec un bilan provisoire pour la zone touchée de plusieurs milliers de maisons ou immeubles brulés.

© Politis

Le 3 mai, le feu avait gagné les abords de Fort McMurray (AFP PHOTO / Lynn Daina).

Tous les habitants de la zone touchée ont dû fuir, après un préavis de quelques minutes, en abandonnant leurs effets personnels et leurs animaux domestiques, avant de parcourir des routes bordées par des flammes d’une dizaine de mètres de hauteur et surtout envahies d’une épaisse fumées qui limite la visibilité à quelques mètres. Une situation, racontent les médias canadiens, qui provoque un gigantesque embouteillage sur les quelques voies carrossables de la région. Ceci en dépit de l’intervention de nombreux pompiers et militaires appuyés par des dizaines de bombardiers d’eau. Des sauveteurs adjurent les fuyards de ne plus prendre des chemins de traverse où le feu peut les encercler d’un moment à l’autre.

Conséquence du réchauffement climatique

Bien que les autorités restent discrètes sur l’origine de ce sinistre sans précédent, il semble bien, rapportent les journalistes canadiens, qu’il se soit déclaré sur la bordure d’un site de sable gorgé de pétrole en cours d’exploitation, et qui n’a pas été combattu efficacement par ses responsables. Lesquels n’ont pas tenu compte des circonstances météorologiques qui marquent depuis des mois la province de l’Alberta.

En effet cette partie du Canada, comme d’autres, est affecté par une sécheresse exceptionnelle liée aux changements climatiques dont presque tout le pays souffre depuis des années. Au point que l’Alberta a déjà connu plusieurs incendies spectaculaires en 2015 et en 2016. De plus, au cœur d’une vague de chaleur inhabituelle, un vent violent et erratique s’est levé et continue de souffler sur toutes la zone, rendant dangereuses les opérations des pompiers au sol. Au point que ces derniers ont renoncé à sauver des flammes la moitié de la ville de Fort Mc Murray déjà touchée par l’incendie qui a franchi l’autoroute la desservant. Avec un bilan social lié à l’ampleur des déplacements et des pertes de maisons et immeubles, et un bilan écologique, du point de vue de la faune et de la flore, sans précédent dans une région déjà sinistrée par les exploitations pétrolières. Pourtant, les officiels mettent seulement en avant le bilan économique en passe d’atteindre 5 milliards d’euros en passant sous silence les conséquences écologiques: la faune sauvage n’a d’autant moins eu la moindre chance de s’échapper que le front des flammes continue à progresser.

Les écologistes canadiens ont déjà protesté contre le manque de précautions qui a marqué l’histoire récente d’un pays ayant renoncé officiellement depuis des années à prendre au sérieux les menaces du changement climatique. Souvent sous l’influence des milliardaires américains de l’énergie qui font pression sur la presse. Au point d’avoir entraîné récemment une protestation collective d’une majorité des scientifiques canadiens. L’arrivée récente au pouvoir du nouveau président, Justin Trudeau, n’a pas encore effacé ce déni collectif.

Écologie
Temps de lecture : 4 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don