Nicolas Hulot ou le « Tina » écologiste

Même Macron reconnaît qu’un seuil irréversible a été franchi.

Jérôme Gleizes  • 22 novembre 2017 abonné·es
Nicolas Hulot ou le « Tina » écologiste
© photo : BERTRAND GUAY / AFP

M****argaret Thatcher, alors qu’elle était Première ministre du Royaume-Uni, avait coutume de dire, à propos du modèle libéral : « There is no alternative » (Tina) – « Il n’y a pas d’alternative possible » . Aujourd’hui, pour contrer les projets écologistes, la même rhétorique est utilisée. Il n’y a pas d’alternative aux choix actuels en matière de transports, d’urbanisme, d’alimentation, d’énergie… Nicolas Hulot est l’incarnation de cette posture avec ses déclarations sur le nucléaire et le glyphosate. Ce retournement est terrible, car sa sincérité écologiste est difficile à remettre en cause. C’est pourquoi ses propos alimentent la sidération ambiante.

Pourtant, des alternatives existent bel et bien. La question essentielle qui se pose aujourd’hui n’est pas « faut-il agir ? », mais « comment agir rapidement ? ». La dernière COP 23, à Bonn, présidée par les îles Fidji, est très inquiétante. La hausse des émissions de gaz à effet de serre a repris. Même Emmanuel Macron, reconnaît qu’un seuil irréversible a été franchi. Pourtant, les mesures nécessaires pour éviter les conséquences de cette situation ne sont pas prises. Or, l’emballement climatique est possible. D’après une étude publiée cet été dans la revue Nature Climate Change, les grandes métropoles pourraient connaître des hausses de température allant jusqu’à 8 °C à l’horizon 2100. La probabilité de ne pas dépasser les 2 °C n’est que de 5 % ! Il faut rompre avec le productivisme et les énergies carbonées si nous ne voulons pas entrer dans une ère incertaine.

Quand des mesures sont prises, nous restons souvent au milieu du gué. Par exemple, le plan climat de Paris qui vient d’être voté part d’un bon objectif : la neutralité carbone et 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050. Logiquement, cela signifie aucune émission de gaz à effet de serre à l’intérieur de Paris (soit une suppression de 6 millions de tonnes de CO2 par rapport à 2014) et une compensation/suppression des gaz émis indirectement (transports aériens, alimentation, matériaux…). La Ville s’engage à sortir des motorisations diesel (2024) et essence (2030) pour que les transports n’émettent plus de CO2. Mais, sur les autres sujets, nous restons loin du compte. Comment feront les prochains plans d’urbanisme pour atteindre la neutralité carbone avec de nouvelles grandes tours (Bercy-Charenton) et de nouvelles zones bétonnées (Triangle de Gonesse) ? Comment sera compensée la hausse du transport aérien due aux Jeux Olympiques de 2024 ? Comment sera financée la rénovation thermique des bâtiments anciens ?

Concluons avec André Gorz, disparu il y a dix ans, qui a posé clairement la question politique majeure dans son dernier article : « La décroissance est un impératif de survie. Mais elle suppose une autre économie, un autre style de vie, une autre civilisation, d’autres rapports sociaux. En leur absence, l’effondrement ne pourrait être évité qu’à force de restrictions, rationnements, allocations autoritaires de ressources caractéristiques d’une économie de guerre. La sortie du capitalisme aura donc lieu d’une façon ou d’une autre : civilisée ou barbare. La question porte seulement sur la forme que cette sortie prendra et sur la cadence à laquelle elle va s’opérer. »

Jérôme Gleizes Enseignant à Paris-XIII.

Chaque semaine, nous donnons la parole à des économistes hétérodoxes dont nous partageons les constats… et les combats. Parce que, croyez-le ou non, d’autres politiques économiques sont possibles.

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