IVG dans le monde : De lents progrès

Si l’interdiction totale de l’avortement recule dans le monde, l’IVG sur simple choix reste minoritaire et pas toujours effectif.

Patrick Piro  • 31 mars 2021 abonné·es
IVG dans le monde : De lents progrès
Dans la nuit du 29 décembre 2020 à Buenos Aires, le parlement argentin légalisait l'avortement.
© Tobias Skarlovnik / NurPhoto / NurPhoto via AFP

On constate une tendance « écrasante » à la libération des lois sur l’avortement depuis 1994, se félicite le Center for Reproductive Rights (Centre pour les droits reproductifs, CRR), référence internationale dans ce suivi. À cette date, 179 pays se sont engagés à lutter contre les avortements à risque. Au cours des vingt-cinq années suivantes, une cinquantaine de pays ont fait évoluer leur loi dans le « bon sens », alors que « seule une petite poignée » a fait régresser les motifs pour lesquels l’avortement est légal.

Ainsi, quinze pays ont rendu légale l’IVG sur simple demande, dont le Népal et São Tome-et-Principe, qui l’interdisaient totalement auparavant, ainsi que le Guyana, le Cambodge et l’Irlande, qui ne l’autorisaient qu’en cas de risque vital pour la mère. L’Afrique est le continent qui a le plus « bougé », même s’il reste le moins libéral, avec l’Amérique latine. La région de loin la plus figée : le Moyen-Orient.

Globalement, le verre reste cependant « à moitié plein ». Au total, 59 % des femmes vivent dans un pays autorisant « largement » l’avortement : 36 % seulement dans un des 67 pays où il suffit de le demander (principalement en Europe et Amérique du Nord), généralement avant la 13e semaine de grossesse ; et 23 % dans un des 13 pays (en Europe : Finlande, Islande et Grande-Bretagne) l’autorisant en fonction de critères socio-économiques élargis.

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Les autres femmes (41 %) vivent sous régime de restriction du droit à l’avortement : 14 % dans un des 56 pays exigeant un motif de santé (y compris mentale, parfois) pour la mère (en Europe : Irlande du Nord, Liechtenstein, Monaco et Pologne) ; 22 % dans un des 39 pays l’autorisant s’il s’agit de sauver la vie de la mère (et parfois aussi en cas de viol, d’inceste ou de malformation du fœtus) ; enfin, 5 % des femmes vivent dans un des 26 pays où l’avortement est illégal en toutes circonstances, y compris en cas de risque vital pour la mère. En Europe, c’est le cas de Malte, et des deux microprincipautés enclavées d’Andorre et de San Marin. D’où il est cependant aisé de se rendre « à l’étranger ». En revanche, les femmes sont généralement condamnées à subir ce déni de droit dans les pays pauvres d’Amérique centrale ou d’Afrique, notamment quand il s’agit d’îles. L’Organisation mondiale de la santé relève que près de 23 000 femmes meurent chaque année de complications résultant d’avortements réalisés dans de mauvaises conditions, la plupart dans des pays aux lois restrictives, et souvent dans la clandestinité. Et puis autoriser l’IVG n’en garantit nullement l’accès effectif. Encore faut-il que les États fournissent un service universellement accessible, souligne le CRR : pas de procédures ou de délais dissuasifs, une information adéquate, des personnels qualifiés en nombre suffisant et des prix abordables.