Sofia Teillet : Entre pollen et pistil

Sofia Teillet mène une réflexion drôle et subtile sur l’état du vivant.

Anaïs Heluin  • 23 juin 2021 abonné·es
Sofia Teillet : Entre pollen et pistil
© Anna Basile

Entre Sofia Teillet et l’orchidée, ce n’était pas gagné. La relation partait même assez mal. Avec ses airs précieux, sophistiqués, le végétal manquait selon elle terriblement d’humilité. Pourquoi tant de manières quand on est en vente à bas prix dans tous les supermarchés, quand on occupe salles d’attente, vitrines de toutes sortes, voire toilettes de restaurant ? Cette aversion s’est toute-fois transformée, à tel point que la comédienne décide de consacrer à la plante son premier spectacle, De la sexualité des orchidées. Soit une conférence tout-terrain, où la science côtoie des tas d’autres choses : des considérations sur la vanité du tyrannosaure, sur le modèle amoureux de la baudroie abyssale et, surtout, sur celui de notre espèce, où pollen et pistil disent plus qu’il n’y paraît.

Pour mettre en scène la vie intime des végétaux et la sienne – elle est le spécimen humain qu’elle étudie le plus en profondeur –, Sofia Teillet joint le geste à la parole. La technique d’attraction des insectes, la symbiose avec un champignon microscopique… Chaque phénomène concourant à la reproduction de l’orchidée, qui explique selon la scientifique en herbe l’exceptionnelle ancienneté de son sujet d’étude, âgé de 75 à 80 millions d’années, se traduit sur scène par une mimique particulière. Avec une maladresse feinte, l’artiste se fait abeille, pétale ou étamine. Elle donne ainsi à la science une allure enfantine, spontanée. Elle la met à portée de rue, de place publique ou de bar, son spectacle étant conçu pour se jouer partout.

Le savoir de Sofia Teillet est donc fort gai. Mais il pose aussi des questions très sérieuses, notamment sur l’égalité hommes-femmes. En détaillant la manière dont le pollen passe du sexe masculin au sexe féminin de l’orchidée, la comédienne reformule à sa façon décalée les mots du rappeur Oxmo Puccino qui ouvrent sa pièce : « Les saisons s’dérèglent, les femmes veulent des couilles, les mecs des règles. »

De la sexualité des orchidées. Festival Les Scènes sauvages, vallée de la Bruche (67), le 27 juin.
Du 7 au 12 juillet au Théâtre du Train bleu, Festival Off d’Avignon.

Tournée sur www.amicaledeproduction.com

Théâtre
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