La victoire exemplaire

La Cour suprême d’Israël a ordonné une modification du tracé du mur près de Ramallah en Cisjordanie.

Denis Sieffert  • 13 septembre 2007 abonné·es

Certains en tireront argument pour louer la démocratie israélienne et la séparation entre les pouvoirs politique et judiciaire. Ce serait faire peu de cas de la mobilisation des Palestiniens et des pacifistes israéliens et internationaux (Américains, Belges et Français, notamment), qui, depuis février 2005, manifestaient chaque vendredi pour demander la destruction du mur. La Cour suprême d’Israël leur a donné partiellement satisfaction, la semaine dernière, en ordonnant la modification du tracé de ce que les Palestiniens appellent le « mur de l’apartheid ». Pour sa construction, quelque deux cents hectares de terres appartenant aux agriculteurs de Bilin, une petite ville de 1 600 habitants située à l’ouest de Ramallah, en Cisjordanie, avaient été confisqués, et des milliers d’oliviers arrachés. De plus, de nombreux villageois s’étaient retrouvés coupés de leurs terres agricoles, auxquelles ils ne pouvaient plus accéder.

Illustration - La victoire exemplaire


Un policier israélien refoule un manifestant palestinien à Bilin, en février 2005. MOMANI/AFP

La lutte de Bilin était devenue exemplaire à la fois par son caractère pacifique et parce qu’elle mêlait Palestiniens et militants israéliens pour la paix. Le 4 septembre, la Cour suprême a reconnu le préjudice porté aux Palestiniens. Dans son arrêté, elle a demandé au gouvernement « d’envisager un tracé alternatif dans un délai raisonnable » . Pour les pacifistes, le cas de Bilin illustre de façon spectaculaire la véritable finalité de ce mur dont la construction a été ordonnée par Ariel Sharon, et qui devrait s’étendre à terme sur plus de 650 km. Loin d’être la « clôture antiterroriste » que prétendent les autorités israéliennes, il est un instrument d’annexion de nouvelles terres. Et d’épuration ethnique. En empiétant profondément sur le territoire palestinien, il vise à contraindre une partie de la population à partir pour pouvoir procéder ensuite à de nouvelles annexions qui pourraient rendre irréalistes toutes perspectives de création d’un État palestinien. Dans le cas de Bilin, l’objectif pour les Israéliens est l’extension de l’énorme colonie de Modi’in Ilit (déjà 35 000 colons), dans laquelle le gouvernement d’Ehud Olmert prévoit de loger 150 000 Israéliens d’ici à 2020.

Le maire de Bilin, Ahmed Issa Abdallah, tout en se félicitant de cette « victoire », a indiqué que le combat allait se poursuivre jusqu’à l’élimination du mur. Dans un avis rendu le 9 juillet 2004, la Cour internationale de justice (CIJ) avait jugé illégale la construction de ce mur d’annexion, et exigé son « démantèlement », comme l’avait ensuite demandé l’Assemblée générale de l’ONU. Israël n’a jamais tenu compte de ces demandes. Le fait qu’il s’agit, cette fois, de la plus haute juridiction d’Israël change évidemment la donne.

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