«La fermeture des frontières est irréaliste »
Claire Rodier poursuit notre réflexion sur « les questions qui fâchent ». Elle explique ici que la liberté de circulation s’impose parce qu’elle existe déjà pour certains, et que toutes les politiques de blocage ont échoué. Retrouvez les autres contributions sur « ces questions qui fâchent à gauche » dans notre rubrique Idées et sur le site de la revue Mouvements.
dans l’hebdo N° 973 Acheter ce numéro
On me demande de répondre à la question : « Une politique d'immigration sans frontières est-elle réaliste ? » Je crois qu'il ne faut pas poser la question dans ces termes. Les frontières existent, leur disparition n'est pas à l'ordre du jour, et elles ont leur fonction dans l'organisation du monde. Mais cette fonction n'est pas forcément d'être un obstacle, une barrière : ce n'est pas parce qu'ils ont des frontières que les États sont contraints de les fermer.
Au contraire : ce qui n'est pas réaliste, c'est une politique d'immigration fondée sur la fermeture des frontières. Il y a dix ans, le Gisti affirmait : « Tout bien réfléchi, la liberté de circulation » [^2]. La formule n'est pas qu'un simple slogan. Pour qui prend le temps de peser tous les éléments du débat, la liberté de circulation s'impose comme une évidence.
Expulsion de migrants à Bologne, en Italie. La liberté de circulation est pourtant consacrée par la Déclaration universelle des droits de l’homme… BENVENUTI/AFP
D'abord, parce qu'elle existe déjà. Aujourd'hui, une partie non négligeable de la population mondiale en jouit déjà presque totalement, et peut passer du territoire d'un pays à un autre en n'ayant à produire qu'un passeport et parfois un visa, formalités qui ne lui coûtent que quelques dizaines d'euros. Revendiquer la liberté d'aller et venir répond, par conséquent, à une simple exigence d'égalité. Pouvons-nous accepter l'idée qu'elle serait réservée à ceux qui ont la chance d'avoir la nationalité d'un pays riche ? Pourquoi ceux que le sort a fait naître du mauvais côté de la planète n'auraient-ils comme alternative, comme c'est le cas aujourd'hui, que d'être « choisis », si leur profil correspond aux besoins des économies occidentales, ou assignés à résidence chez eux, au mépris du droit international ? Car, il faut le rappeler, la liberté de circulation est consacrée par la Déclaration universelle des droits de l'homme, selon laquelle « toute personne a
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