L’excité de Neuilly

Christine Tréguier  • 4 octobre 2007 abonné·es

Le site Agoravox revient fort à propos sur le docu-fiction Human Bomb , diffusé la semaine dernière par France 2. Cette production, somme toute assez banale, a bénéficié d’un fort effet d’annonce. Et pour cause, elle met en scène Nicolas Sarkozy. Ou plutôt son personnage, joué par un comédien qui restitue fort bien son côté hyperactif et bateleur.

La question que soulève Agoravox est celle de la « relation à l’information » et de la qualité de l’information disponible, quatorze ans après la prise d’otages de 22 enfants dans une maternelle de Neuilly. Une affaire dont le dénouement ­ la mort d’Erick Schmitt alias HB (Human Bomb) ­ avait, à l’époque, suscité une polémique. Les hommes du Raid avaient-ils froidement liquidé un homme inerte, gavé de somnifères, ou celui-ci s’était-il réveillé, justifiant le tir de légitime défense ? Quelques anomalies jetaient le doute sur les circonstances exactes de cette mort : le double-top (deux balles dans le même trou) supposant qu’il n’avait pas bougé, le procureur Lyon-Caen non prévenu de l’intervention, la cassette vidéo de celle-ci inutilisable, la cagoule de HB lavée avant d’être transmise au juge d’instruction, etc. Deux magistrats membres du Syndicat de la magistrature (SM) avaient, dans leur livre la Mort hors la loi d’Erick Schmitt, conclu à « un homme tué dans son dernier sommeil » . Poursuivis par le ministre de l’Intérieur en exercice, Charles Pasqua, ils seront condamnés pour diffamation. Le docu-fiction réalisé par Patrick Poubel ne dit rien de tout cela. Tout juste donne-t-il brièvement la parole à la soeur et à l’avocat d’Erick Schmitt, dont la plainte pour homicide s’est soldée par un non-lieu.

L’autre question, c’est celle du rôle attribué à Nicolas Sarkozy. Les scènes de reconstitution suggèrent que son arrivée est décisive et accélère la libération des bambins. En réalité, lorsqu’il arrive sur les lieux, ce processus est déjà en cours, et le chef du Raid a déjà fait sortir huit petits. Selon les deux magistrats du SM, ce dernier aurait accueilli l’arrivée du maire de Neuilly avec appréhension et l’aurait intégré au dispositif faute de pouvoir le refuser. Jean-Pierre About, de TF 1, dira que, dès son arrivée, Nicolas Sarkozy courait partout, parlait au Raid, aux parents et surtout aux journalistes, et qu’ « il était toujours devant les caméras » . Dans la presse, au lendemain du drame, un père s’étonnera de l’attitude de ce type qui lui prend son enfant des bras pour poser devant les photographes. Mais tout cela reste hors champ. L’image force officielle doit rester celle d’un maire plein de courage. D’autres diront plein d’inconscience.

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