La loi du plus fort
Le projet de loi censé moderniser le marché du travail porte atteinte
aux droits fondamentaux des salariés. L’analyse de deux juristes,
Rémi Lambert et Aurianne Cothenet.
dans l’hebdo N° 996 Acheter ce numéro
La « réforme historique » tant attendue, selon les mots prononcés par le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel, est un projet de loi dit de « modernisation du marché du travail » , qui sera présenté à la mi-avril au Parlement. Ce texte transpose, en partie, l'accord national interprofessionnel (ANI) signé le 11 janvier entre trois organisations patronales et quatre syndicats représentatifs (CFDT, CFE-CGC, CFTC et FO) sur cinq. Le gouvernement en a fait le symbole d'une « flexisécurité » à la française, conciliant flexibilité pour les entreprises et sécurité pour les salariés. Un examen attentif de ce texte montre que le nouveau dispositif, qui pourrait s'appliquer dès l'été, réduit considérablement les droits des salariés. Et ce n'est qu'un début. Le gouvernement procède en effet par étapes : la loi mettra en oeuvre une partie de l'ANI. Le pire reste donc à venir.
Les prud’hommes ont condamné l’équipementier automobile Valéo en 2006 pour licenciements abusifs. CABANIS/AFP
Pour Rémi Lambert, avocat spécialiste en droit du travail, exerçant entre autres dans le secteur « Droits, libertés, actions juridiques » de la confédération CGT, le projet de loi « remet en cause des acquis véritablement historiques. En particulier, la création de la section syndicale d'entreprise et la loi du 13 juillet 1973, qui, dans le code du travail, pose le principe de la nécessité de motivation du licenciement par une cause réelle et sérieuse objective ».
« Cette "modernisation" , ajoute Aurianne Cothenet, juriste à l'université Paris-X-Nanterre, coauteur d'une note de la Fondation Copernic sur l'ANI, fait de la loi l'instrument de satisfaction d'une ancienne revendication patronale en guise de progrès social : créé pour limiter le pouvoir de l'employeur, le droit du travail a plus que jamais pour fonction assumée la sécurité des employeurs, c'est-à-dire de rendre au pouvoir patronal sa plénitude. »
Les deux juristes détaillent les points les plus régressifs du projet de loi.
CDD «à objet
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