Journalisme et banlieue

Xavier Frison  • 29 mai 2008 abonné·es

Au cours de trois jours de débats tantôt captivants, tantôt décousus, les Assises du journalisme de Lille (du 23~au 25~mai) ont réservé quelques belles surprises. Parmi celles-ci, l’atelier consacré à la pratique du journalisme età la banlieue, réunissant des professionnels des médias travaillant dans, pour ou sur les banlieues. Débarrassés des têtes d’affiche des Assises en même temps que de la grande salle et de son assistance foisonnante, les débats ont notamment porté sur la question de l’accès à la profession des aspirants journalistes issus des cités. «Il faut ouvrir les rédactions, donner accès aux médias aux gens des quartiers, suggère Erwan Ruty, cofondateur de l’agence de presse Ressources urbaines. Les choses commencent à bouger, mais cela va-t-il assez vite ?» Pour lui, la presse est «un cénacle de plus en plus fermé. Et les périodes de crise économique sont rarement favorables à la prise de risque». À l’heure actuelle, «les rédactions ne sont pas prêtes à accueillir des gens des quartiers», confirme le responsable de la sélection à l’École des métiers de l’information-CFD, à Paris.

Attention, cependant, à l’écueil qui consisterait à «chercher des journalistes au profil similaire des gens à interviewer», souligne une journaliste de Ouest-France. «Dire qu’il faut être issu du quartier pour parler du quartier, c’est de l’anti-journalisme !», renchérit Nathalie, une ancienne de l’émission «Saga-Cités» et de l’association Place publique. Mais, comme pour tout autre domaine journalistique, «il faut un minimum de bagage, un réseau et un savoir-faire pour bosser sur les banlieues», estime Mohammed. «Des journalistes spécialisés sur les quartiers, oui, mais je suis contre les “rubriques Quartiers”, qu’on appelle parfois Société», réagit Erwan Ruty : «Quand on parlera du quotidien des banlieues comme on parle du quotidien partout ailleurs, on aura réussi quelque chose. Parler de l’ordinaire permet de comprendre l’extraordinaire.»

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