De quels droits?/Les machines battues par le papier

Christine Tréguier  • 11 juin 2009 abonné·es

La fiabilité des machines à voter avait été fortement mise en cause lors de l’élection présidentielle de 2007, amenant tous les partis politiques sauf l’UMP à demander un moratoire sur leur utilisation.
En cause, leur vulnérabilité aux pannes et à d’éventuelles intrusions extérieures, l’impossibilité pour l’électeur de savoir si son vote a été correctement enregistré, et l’impossibilité d’effectuer un recomptage a posteriori , faute de trace papier. Depuis, le sujet est quelque peu passé aux oubliettes. On attend toujours la publication des conclusions du groupe de travail mis en place par le ministère de l’Intérieur. Celles-ci ne doivent pas être très favorables car, en février 2008, en réponse à une question du député Vert François de Rugy, Michèle Alliot-Marie annonçait qu’ « aucune autorisation supplémentaire ne sera pour le moment accordée à de nouvelles communes qui souhaiteraient recourir au vote sur machines » . Raison évoquée : « un développement relativement rapide » qui n’aurait pas permis aux ordinateurs de vote d’atteindre le même stade de maturité et d’acceptation que le vote papier.

Pas de remise en cause, puisque les communes équipées sont autorisées à s’en servir, mais le ministère joue la prudence en optant pour un moratoire tacite, dans l’attente, dit-il, d’une réévaluation globale du système, promise pour « avant les élections européennes de 2009 » . Depuis, un an a passé et rien n’a été fait. Cela explique que le nombre de communes ayant utilisé les machines à voter ce week-end soit en baisse : 64 contre environ 80 en 2007. Certaines ont même décidé d’abandonner leur projet d’équipement. Début 2009, cependant, le secrétaire d’État Alain Marleix a fait savoir que des adaptations des machines à voter étaient en cours de réalisation et qu’elles pourraient être insérées dans un projet de loi sur la modernisation de la vie démocratique locale. Et d’ajouter : « Il n’est pas concevable qu’une société comme la nôtre, où les nouvelles technologies de l’information et de la communication se développent, en reste à des modes de votation obsolètes. »

Avec la Belgique, la France est donc désormais l’un des rares pays européens à préconiser ce type de scrutin. L’Italie, l’Angleterre et l’Espagne ne sont pas allées au-delà d’expérimentations ponctuelles. Les pays qui avaient fait le choix de s’équiper ont plutôt tendance à faire marche arrière. Après avoir retiré la certification du principal constructeur, Nedap, les Pays-Bas ont abandonné l’idée de développer une nouvelle génération de machines et décidé de revenir au bon vieux vote papier. En Allemagne, c’est le Tribunal constitutionnel fédéral, saisi par un électeur, qui a jugé les appareils non conformes. Les machines à voter restent légales, mais ne pourront être utilisées pour les élections de 2009. Le tribunal exige désormais un « contrôle de conformité fiable » , autrement dit la possibilité d’imprimer et de recompter des bulletins papier. C’est également l’argument retenu en Irlande par la Commission parlementaire sur le vote électronique. Mais le coût de cette sauvegarde papier (28 millions d’euros) a finalement conduit le gouvernement à définitivement remiser les urnes électroniques.

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