L’art du transfert

La période estivale s’y prête chaque année : le bouleversement des têtes d’affiche prend des allures de chaises musicales. Comme au foot.

Jean-Claude Renard  • 9 juillet 2009 abonné·es

Le terme classico est un cliché du football, le rendez-vous annuel des aficionados, et pour le coup (de pied) entre le Real et le Barça (entendez Madrid face à Barcelone). Non pas une opposition de terrain mais celle d’une philosophie (l’armée franquiste contre le front républicain). Mercato, comme classico, est un terme emprunté au football. Repris aujourd’hui par le paysage médiatique. Avec parfois des infiltrations d’un secteur à l’autre. Il y a déjà lurette que M6 possède le club des Girondins de Bordeaux, qu’un Charles Villeneuve a dirigé le PSG. Aujourd’hui, Jean-Claude Dassier, ex-directeur d’Eurosport et directeur de l’info sur TF 1 (désavoué par ses journalistes), a pris les rênes du management de l’Olympique de Marseille. À l’évidence, le foot se veut très perméable à TF 1. Et en un mois, l’OM, ayant bouclé la saison à la deuxième place (directement qualificative pour la Ligue des champions, et très lucrative), aura réussi la gageure de se séparer brutalement de son entraîneur, Éric Gerets, et de son manager, Pape Diouf. Comme l’écrit le Canard enchaîné dans son numéro du 24 juin, « heureusement que les joueurs n’ont pas fini premiers, sinon, toute l’équipe était virée ! » (les prochaines négociations sur les droits de retransmission du foot, quand on est juge et partie, risquent une bouillabaisse recuite). La fin annoncée de Robert-Louis Dreyfus, actionnaire principal de l’OM, n’était pas étrangère au pataquès. Sa mort, survenue le 4 juillet, ne va rien arranger.

Virée sans l’être, c’est le cas d’Audrey Pulvar troquant France 3 pour i-Télé, au 18-20 heures, en lieu et place de Nicolas Demorand, lequel retrouve un poste pour un magazine politique sur France 5, tout en conservant sa matinale sur France Inter. Audrey Pulvar quittant France 3, c’est la sortie de la seule présentatrice pugnace du service public, la seule tête d’affiche à s’être érigée ouvertement contre la réforme du service audiovisuel public imposée par Nicolas Sarkozy. La journaliste passe ainsi de quelques millions de téléspectateurs à quelques centaines de milliers. À vrai dire, elle n’a jamais visé l’audimat mais plutôt la qualité du travail. La rédaction de France 3 ne lui en a pas donné les moyens. Dans ce pataquès absurde, la non-reconduction de Jean-Luc Delarue et de son magazine « Ça se discute », finissant par lasser tout le monde, est évidemment un épiphénomène. Tandis que, face à l’unanimité des syndicats, suivant l’éviction de Frédéric Pommier de sa revue de presse, Philippe Val, à la tête de France Inter, semble profiter de la mi-temps estivale. En attendant une rentrée chaude.

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