C’est la rentrée et c’est reparti !

Enseignants et chercheurs n’entendent rien lâcher après les fortes mobilisations du printemps dernier. Une mobilisation nationale est prévue le 7 octobre.

Antoine Vezin  • 8 octobre 2009 abonné·es
C’est la rentrée et c’est reparti !

Le mouvement de résistance de l’année 2008-2009 est loin d’être terminé. Malgré la forte mobilisation de la communauté universitaire avant l’été, le gouvernement a réaffirmé ses orientations nocives pour le service public d’enseignement et de recherche, assurant que « la réforme est en marche » . De leur côté, les collectifs et les syndicats demandent toujours la refonte des lois relatives aux libertés et à la responsabilité des universités (LRU). « Ce n’est pas la réforme qu’il nous faut, commente Isabelle This Saint-Jean, secrétaire générale du collectif Sauvons la recherche. Nos recommandations, exprimées depuis 2004 lors d’États généraux, n’ont pas été reprises, ou bien ont été totalement déformées. »
En toile de fond, se dessine ainsi un désengagement progressif de l’État dans ses responsabilités financières envers le supérieur, creusant les inégalités entre universités, sur le recrutement des enseignants et sur l’offre des disciplines enseignées. Les interrogations portent sur le manque de moyens pour appliquer les programmes nationaux et sur la reconnaissance collective des qualifications, remplacée par l’individualisation des contrats de travail (contrats d’objectifs et de moyens). À la clé, une concurrence entre enseignants et chercheurs, et l’évaluation de leurs performances. En somme, un glissement de la fac publique vers l’université privée.

Point essentiel de la mobilisation au printemps, la réforme de la formation des enseignants demeure une zone d’ombre, au moins jusqu’à la fin du mois de novembre, avec la remise du projet définitif de masterisation (bac +5). En attendant, les enseignants s’inquiètent sur les stages en « responsabilité » de 108 heures dans les établissements scolaires (écoles élémentaires, collèges et lycées) dès la première année, comme mesure transitoire. Pour Gisèle Jean, secrétaire déléguée à la formation des enseignants du Syndicat national de l’enseignement supérieur (Snesup), « la profession d’enseignant ne s’apprend pas simplement sur le tas, et les incitations financières [3 000 euros pour les 108 heures] détournent les étudiants de leur préparation aux concours » . Autre secteur lésé par la réforme, les instituts universitaires de technologie (IUT) et leurs presque 120 000 étudiants, affaiblis par une diminution des ressources liée à l’autonomie des universités. Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, s’est engagée à revoir l’évaluation des ressources des établissements. Néanmoins vigilante, une majorité de syndicats du supérieur, le Snesup en tête, appellent à se joindre à la journée de mobilisation nationale du 7 octobre.

Pour Isabelle This Saint-Jean, « la recherche française ne manque ni de qualités ni de dynamisme, mais de moyens ». Même si les mobilisations, « exceptionnelles de la part d’universitaires » , n’ont pas été vaines (voir Politis n° 1055), les résultats ne sont pas à hauteur des attentes. À titre d’exemple, la revalorisation des carrières, évidemment nécessaire, n’était pas le point d’orgue des mobilisations. « Les primes d’excellence ne sont en rien incitatives, ajoute Isabelle This Saint-Jean, c’est même insultant de réduire la lutte à de ­simples intentions pécuniaires. »
À la veille de cette rentrée, on peut se demander dans quel état sont les forces militantes. Isabelle This-Saint Jean craint qu’un « ras-le-bol général » ne s’installe face à l’entêtement du gouvernement, tandis que le Snesup oppose à la « prophétique rentrée sereine » de Valérie Pécresse « un contexte propice aux mobilisations dans toutes les composantes de l’université. Aucune réforme ne saura être menée contre elle, au risque de stériliser durablement l’enseignement supérieur et la recherche ».
Le ministère de l’Éducation nationale avait promis qu’il n’y aurait pas de suppression de postes à la rentrée 2010. Le projet de loi de finances 2010 en prévoit 14 600. De quoi réanimer la mobilisation.

Société
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

En France, l’État acte l’abandon des quartiers
Quartiers 23 avril 2025 abonné·es

En France, l’État acte l’abandon des quartiers

En voulant supprimer l’Observatoire national de la politique de la ville, le gouvernement choisit de fermer les yeux sur les inégalités qui traversent les quartiers populaires. Derrière un choix présenté comme technique, c’est en réalité un effacement politique du réel qui se joue. 
Par Maxime Sirvins
Protection de l’enfance, en finir avec les liens du sang
Enquête 23 avril 2025 abonné·es

Protection de l’enfance, en finir avec les liens du sang

Selon la Convention internationale des droits de l’enfant, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être « une considération primordiale » dans toutes les décisions qui le concernent. Mais en France, la politique familialiste a longtemps privilégié les droits des liens biologiques. Les lignes commencent à bouger et se heurtent à l’état désastreux de la protection de l’enfance.
Par Elsa Gambin
« Il existe une banalisation des pratiques non conventionnelles de soin »
Entretien 17 avril 2025 abonné·es

« Il existe une banalisation des pratiques non conventionnelles de soin »

Donatien Le Vaillant, chef de la Miviludes, revient sur le dernier rapport d’activité de la mission interministérielle, révélant une augmentation continuelle des dérives sectaires entre 2022 et 2024 en matière de santé.
Par Juliette Heinzlef
« Avant, 70 % des travailleurs géraient la Sécu. Aujourd’hui, c’est Bayrou. Voilà le problème »
La Midinale 16 avril 2025

« Avant, 70 % des travailleurs géraient la Sécu. Aujourd’hui, c’est Bayrou. Voilà le problème »

Damien Maudet, député LFI-NFP de Haute-Vienne, auteur de Un député aux urgences aux éditions Fakir, est l’invité de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien