L’effet Eva Joly

Ex-magistrate, la nouvelle eurodéputée est devenue la personnalité emblématique de la réussite d’Europe Écologie.

Patrick Piro  et  Lena Bjurström  • 10 décembre 2009 abonné·es

Commentant l’arrivée d’Eva Joly sur la liste Europe Écologie, Daniel Cohn-Bendit s’exclamait il y a un an : « Que je sois n° 1 ou n° 2, avec elle, je suis sûr qu’on fait plus de deux élus en Île-de-France ! » Les résultats des élections européennes de juin dernier lui ont donné ­raison. Novice en politique, la magistrate a livré une prestation qualifiée de « révélation », suscitant un véritable engouement du public. « Je voyais bien la réaction des gens quand je distribuais des tracts, se remémore Patrick Farbiaz, secrétaire du groupe des Verts de Paris XXe. Mais personne ne pouvait prévoir un tel effet “Eva Joly”. » « C’est elle qui remplissait les salles » , relate Pascal Canfin, qui reconnaît lui devoir en grande partie son élection surprise, tout comme Karima Delli, respectivement 3e et 4e de la liste francilienne. Tous deux jeunes militants Verts, ils avaient pour mission, au sein du dispositif de campagne, d’assister Eva Joly afin d’assurer son élection. « Finalement, c’est elle qui nous a aspirés » , convient Pascal Canfin.

Certains accentuent le trait, prétendant même que c’est essentiellement à Eva Joly que les écologistes doivent ce résultat record – 14 élus. Sa présence a bien sûr suscité des railleries sur son statut de vedette se prêtant complaisamment au jeu de la politique « pipole ». Eva Joly semblait trop dépourvue d’expérience, et peut-être trop spécialisée dans son domaine de prédilection professionnel – la lutte contre la corruption, qui l’a rendue célèbre avec les affaires Tapie et Elf dans les années 1990. « En fait, c’est sa personnalité qui a pris le dessus, estime Hakim Romatif, coordinateur pour l’événementiel et les médias lors de la campagne de juin dernier en Île-de-France. Elle transmet l’image d’une personne rigoureuse et intègre, et je pense que c’est cela que les gens sont venus chercher en elle. » Mais son rayonnement n’aurait jamais été aussi fort s’il n’avait pas été porté par l’image de cohésion donnée par Europe écologie, souligne Karima Delli : « Ce qui a fait notre force, c’est ce rassemblement de gens aux compétences différentes. » Pour elle, la différence d’Eva Joly réside dans son combat, « un combat que les Verts portaient peu, et qu’elle incarne parfaitement » . « Elle incarne notre volonté de changer les choses au sein même des institutions » , ajoute Pascal Canfin.

Que devient la « novice » au Parlement européen ? Eva Joly y préside la commission développement et travaille particulièrement sur le lien entre développement et fiscalité. Elle a notamment proposé la création d’un nouveau poste de rapporteur permanent sur l’évasion fiscale afin d’en améliorer l’évaluation. Du concret, comme elle aime. « Elle a parfaitement endossé ses habits de députée, avec un dévouement total, témoigne Franck Laval, porte-parole de l’association des Amis d’Europe Écologie. Et ça la passionne visiblement… »

Publié dans le dossier
Régionales : des Verts très ouverts
Temps de lecture : 3 minutes