La dangereuse inculture des démagogues

Non content de revaloriser la colonisation, le gouvernement en importe les dispositions répressives.

Olivier Le Cour Grandmaison  • 18 février 2010 abonné·es

À quelques jours du cinquième anniversaire de la loi du 23 février 2005, donnant une interprétation positive du passé colonial, rappelons l’article premier de ce texte toujours en vigueur. « La Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d’Algérie, au Maroc, en Tunisie et en Indochine… » Scandaleuse exception française puisque ce pays est le seul État démocratique et la seule ancienne puissance impériale européenne à s’être engagé dans cette voie. À cela s’ajoute le discours prononcé le 7 février 2007 à Toulon par le candidat Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle. Là, il s’est livré à la réhabilitation, sans précédent depuis 1962, de la colonisation, conçue par lui et son conseiller, Henri Guaino, comme une entreprise de civilisation. Original, n’est-ce pas ? Ce dernier a récidivé avec le sinistrement célèbre discours de Dakar, lu par le chef de l’État le 26 juillet 2007. Reprenant à son compte des conceptions racistes éculées, il déclarait, entre autres joyeusetés dignes de demeurer dans le volumineux bêtisier du quinquennat : « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. » À quoi l’on pourrait rétorquer ceci : le drame des démagogues Sarkozy et Guaino, c’est qu’en ces matières ils sont d’une inculture crasse.

Enfin, certaines dispositions répressives, d’abord appliquées dans les colonies, furent par la suite importées en métropole puis mises en œuvre contre des allochtones et des nationaux. C’est le cas de l’internement administratif et des peines prévues pour sanctionner « l’asile donné […] aux étrangers sans papiers » . Extrait de l’article L. 622-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ? Non. Citation de l’article 19 du code de l’indigénat algérien du 9 février 1875 !

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