Une fluidité politique

Denis Sieffert  • 18 mars 2010 abonné·es

Comment expliquez-vous
cette abstention record ?
Les causes sont évidemment multiples. Les citoyens considèrent que les hommes politiques ne s’occupent pas de leurs problèmes : le logement, l’emploi, l’école… Les hommes politiques se désintéressant des problèmes des citoyens, les citoyens se désintéressent des problèmes des hommes politiques. Ce qui ne veut pas dire qu’ils ne s’intéressent plus à la chose publique. Mais il y a aussi une difficulté d’identification à l’échelon régional, notamment parce que le scrutin est départementalisé. Si le scrutin était régional, il y aurait certainement une identification plus forte à la région, comme c’est le cas avec la commune.

Quelles conclusions tirer
de ce scrutin ?
Certainement pas des conclusions définitives. Notre société est devenue, comme le note le sociologue Zygmunt Bauman, une société fluide. Fluide dans les comportements quotidiens, fluide dans les comportements amoureux, fluide dans les comportements sociaux, elle est fluide aussi pour les comportements électoraux. D’une élection à l’autre, on peut très bien aujourd’hui passer d’un parti à un autre. Cette fluidité empêche aussi les partis politiques de construire des stratégies à long terme. Imaginez que le Parti socialiste construise une stratégie d’alliance avec le MoDem, et le MoDem s’effondre. Mais ça ne veut pas dire que François Bayrou ne peut pas revenir dans un scrutin à coefficient personnel plus fort. Le raisonnement vaut aussi pour le NPA dans des élections qui suivraient des mouvements sociaux. Mais si l’électorat est fluide, c’est aussi parce que les partis politiques eux-mêmes le sont. S’il y avait une offre politique claire et stable, cela contribuerait à stabiliser l’électorat. Si l’offre est fluide, il ne faut pas s’étonner que l’électorat soit désorienté.
C’est aussi l’effet de la présidentialisation de la vie politique qui conduit à considérer que les autres élections n’ont pas beaucoup d’influence sur la vie pratique. Ce qui est une erreur.

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Deuxième tour : et maintenant le KO ?
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