Rebelles voix

Par Dorian Lynskey, une histoire de la chanson contestataire contemporaine.

Éric Tandy  • 18 octobre 2012 abonné·es

Le chapitre d’ouverture prend pour thème Strange Fruit, que chanta Billie Holiday en 1939 ( «   La première chanson à introduire un message politique clair dans le divertissement   », explique l’auteur) ; les quinze dernières pages, consacrées à American Idiot, un album enregistré en 2004 par le groupe de punk rock californien Green Day, répertorient le peu d’artistes états-uniens qui s’étaient engagés contre George Bush au moment de ses deux élections…

Entre ces deux repères, c’est toute l’histoire de la chanson protestataire contemporaine, américaine, anglaise, mais aussi chilienne (Victor Jara) ou africaine (Fela Kuti), qui est narrée dans les deux tomes de 33   Révolutions par minute du journaliste britannique (au Guardian entre autres) Dorian Lynskey. Le premier volume couvre les années 1939-1976, et s’arrête à War Ina Babylon, du groupe de reggae Max Romeo and The Upsetters ; le second débute par la naissance du punk rock en 1977, avec White Riot de The Clash, et se termine sur Green Day. Le rap de Public Enemy et de Grandmaster Flash est aussi évoqué. La lecture de ce livre est passionnante, Lynskey ne se contentant pas de recenser les classiques du genre ( Masters of War, de Bob Dylan, ou Give Peace a Chance, de John Lennon), de raconter leur gestation ou de rappeler les événements qui les ont inspirés. Ses recherches s’attardent en profondeur sur les époques, les contextes musicaux et sociaux, et sur les personnes.

Des anecdotes sont racontées , des faits peu connus sont révélés. Ainsi, dans un passage consacré au rebelle de la musique country Steve Earle et à son John Walker’s Blues (John Walker étant le jeune américain « fondamentaliste » capturé par l’armée US en Afghanistan), on apprend qu’après le 11 Septembre, une liste de chansons à ne plus diffuser circulait dans les stations de radio américaines. Les autres enregistrements de leurs interprètes, jugés non patriotiques, étant aussi interdits d’antenne. L’évocation des débuts du punk rock britannique est, elle, prétexte à une description terrible de l’Angleterre de la fin des années 1970. La violence y était omniprésente : attentats ou émeutes, guerre des gangs… Des militaires et des industriels – raconte Lynskey – s’étaient même réunis avec l’idée de fomenter un coup d’état « à la Pinochet ». On comprend alors mieux pourquoi, dans un pareil climat ambiant, le premier 45T des Sex Pistols, Anarchy in The UK, trouva immédiatement un formidable écho.

Culture
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