Plaidoyer pour l’abonnement

Denis Sieffert  • 19 décembre 2012 abonné·es
Plaidoyer pour l’abonnement

Depuis un an, nous alertons régulièrement nos lecteurs sur les conséquences de la crise de la distribution sur l’économie de notre journal. Si l’on veut voir le problème par le petit bout de la lorgnette, on incriminera évidemment les grèves qui retardent la mise en place de Politis dans les quelque 8 000 points de vente où nous sommes présents. Lorsque Politis n’est pas au rendez-vous de ses lecteurs le jeudi, jour de sa sortie, il n’y a pas ou peu de « séances de rattrapage ». A fortiori lorsqu’il est en vente le samedi, voire le lundi, comme cela arrive parfois.

Mais s’en prendre aux mouvements sociaux de salariés qui subissent de plein fouet le plan de restructuration de Presstalis, la principale société de messagerie, serait confondre les causes et les conséquences. Nous ne pouvons que comprendre la réaction de salariés qui défendent leur emploi alors qu’on leur annonce la suppression d’un millier de postes sur 2 500, et qu’au « niveau 3 », celui des kiosques et des marchands de journaux, les fermetures se multiplient.

Nous sommes là en bout de chaîne d’une crise beaucoup plus profonde qui affecte toute la presse d’information générale. Les chiffres de certains de nos confrères, publiés ces jours-ci, témoignent bien d’un déclin qui n’est pas seulement français  : une chute de diffusion de 3,4 % a été enregistrée pour la presse européenne, et de 4,3 % en Amérique du Nord (voir l’article de Jean-Claude Renard p. 21). On en connaît les causes : la concurrence du numérique, souvent gratuit, très réactif, et qui fournit, en particulier à un lectorat jeune, une offre variée et d’une grande souplesse. La prolifération de journaux gratuits constitue un autre facteur de crise, mais qui n’affecte sans doute que très faiblement les ventes de Politis .

C’est donc davantage à une mutation que nous assistons. Nous sommes dans cet « entre-deux » où la presse papier est durement frappée sans que le numérique ait encore trouvé un système économique viable, hormis peut-être Mediapart. Car, que ce soit Internet ou le papier, la question du prix d’une information de qualité ne pourra jamais être éludée.

Nous en sommes là en tout cas, en cette périlleuse croisée des chemins. Et un journal comme Politis , qui n’a derrière lui ni banque ni marchand de canons – ce n’est surtout pas un regret ! –, ne dispose pas des ressources et des recours qui lui permettraient de subir plusieurs années de pertes. Comme toujours, depuis vingt-cinq ans que ce journal existe, il nous faut donc compter sur nous-mêmes et sur nos lecteurs.

Dans un premier temps, et dans l’urgence, il n’y a qu’une solution : l’abonnement. Nous avons déjà eu l’occasion de rappeler ce calcul simple : une vente en kiosque – quand elle a lieu – rapporte moins d’un euro au journal sur les 3 euros du prix de vente ; un abonnement en prélèvement automatique, qui coûte 2,50 euros l’exemplaire à l’acheteur, rapporte 2 euros au journal. Un calcul d’ailleurs théorique. Car, le problème, c’est que la vente en kiosque n’a pas toujours lieu… L’économie de notre vente au numéro devient alors carrément négative.

Hélas, le simple maintien de nos abonnements ne permet pas de compenser cette sévère érosion. Il faut donc, une nouvelle fois, inviter nos lecteurs acheteurs au numéro à franchir le pas de l’abonnement. C’est en augmentant le nombre de nos abonnés que nous pourrons continuer à être présents en kiosque. Et nous comptons sur ceux de nos lecteurs qui sont déjà abonnés pour qu’ils convainquent leurs proches et leurs amis.

Les uns et les autres disposent pour cela d’instruments simples : l’offre spéciale de fin d’année en p. 48, la languette qui figure en page centrale du journal et le site politis.fr. Si nous voulons retrouver l’équilibre en 2013, c’est un millier d’abonnements supplémentaires qu’il nous faut ! Nous disposons pour y parvenir d’une réelle force de frappe : les quelque 600 adhérents de l’association de nos lecteurs Pour Politis. Grâce à eux, Politis a été présent en 2012 dans plus de 70 salons et manifestations, ce qui correspond à des recettes non négligeables et nous assure une visibilité indispensable. Il nous faut aussi remercier les 156 donateurs qui sont intervenus via l’association Presse et pluralisme. C’est 15 588 euros qui ont été recueillis en quatre mois.

Voilà pour l’immédiat. Mais il nous faut aussi préparer l’avenir. Et l’avenir, c’est principalement le numérique. Nous travaillons à l’amélioration de notre offre sur le site, en contenu et en confort de lecture, ainsi qu’à de nouvelles applications. Nous proposerons en 2013 des évolutions sensibles pour améliorer notre offre numérique, nous y reviendrons le moment venu. D’abord à l’occasion d’un premier rendez-vous, le 16 février, pour l’assemblée générale annuelle de Pour Politis[[Une assemblée
qui se tiendra cette année sous le chapiteau du cirque Romanès, et qui sera suivie du nouveau spectacle dont il est question dans ce numéro, p. 44.]].

Nous entamerons alors avec nos lecteurs, qui sont aussi nos principaux actionnaires, une discussion importante pour l’avenir. Car nous sommes convaincus que la conjoncture politique est favorable à un journal comme Politis , représentatif d’une gauche critique, sociale et écologique. Une vraie gauche en somme, par contraste avec une « gauche relative » qui ne l’est qu’en comparaison de Nicolas Sarkozy.

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