Républicaniches

J’aimerais que nous ayons ensemble une pensée pour les dizaines (ou peut-être sont-ils des centaines) de journaleux et de politicien(ne)s qui nous ont, dans le cours de la dernière décennie, rompu menu les parties basses en cacardant que certaines banlieues étaient des « territoires perdus de la République », appelés aussi « zones de non-droit   [^2]». Puis pour ceux, également (et tu auras bien sûr notu que ce sont le plus souvent les mêmes), qui depuis ces dix années vont glapissant que nous vivons sous la menace directe du « terrorisme islamiste ».

Ces gens se présentent généralement – je suis bien certain que tu l’auras aussi relevé – comme d’exigeant(e)s républicain(e)s, passionnément attaché(e)s, de surcroît, à la protection des biens et des personnes. De sorte que, s’ils fustigent des jeunes banlieusard(e)s « issu(e)s de l’immigration », ce n’est pas duuu tout par l’effet d’un quelconque racisme (allons, âââllons, qu’allais-tu imaginer là), et que s’ils expectorent quotidiennement (ou presque) des commentaires infects où les musulman(e)s de France sont touillés dans le même mortier qu’Oussama Ben Laden, ce n’est bieeen sûr pas parce qu’ils seraient islamophobes (paaas de procès d’intention, de grâââce), ni même sécuritaires, mais parce que prudence est mère de sûreté : faudrait quand même pas qu’à force de trop humanismer on laisse les chefs d’Al-Qaida en Val-d’Oise (AQVO) recruter impunément des centaines de milliers de poseurs de plastic, pas vrai ?

Mais pendant tout ce temps, pendant que ce petit monde se faisait de longs et grasseyants gargarismes de son républi-de-mes-deux-canisme, il a laissé se développer, dans son très proche entour, mais sans jamais hausser le ton, une véritable zone dangereuse, rongée par un terrorisme qui en fait, à l’aune des critères généralement retenus pour juger de ces choses, l’un des endroits le plus flippants du monde occidental : la Corse, of course. Où les natifs épris d’artificerie peuvent très posément, et comme pour mettre un peu de neuf dans la routine des assassinats vendettâtres, faire péter dans la même nuit (bleue) 24 bombes, et perpétrer chaque an plusieurs dizaines d’autres attentats, sans que cela offusque trop les oligarchies « républicaines » – et la médiatique, notamment – qui se sont fait une spécialité de bouffer du banlieusard et du mahométan à chaque petit-déjeuner.

Car, dans les dispositifs où ces « élites » enfument les masses, les musulmans qui ne posent pas de bombes doivent par règle être présentés comme beaucoup – beaucoup – plus inquiétants que les hautes figures insulaires qui jouent très – très – régulièrement du flingue et de la grenade. Et les endroits que le bon peuple est invité à regarder comme anxiogènes doivent être situés non loin de Villers-le-Bel plutôt que vers Ajaccio.

[^2]: Où que la police entre plus, mâme Dupont, ou sinon elle se prend sur l’occiput les gigantesques frigidaires que lui lancent de l’haut des tours de leurs cités des individus basanés – elle est belle, la France, HEIN.