Compte à rebours du climat. Le GIEC inquièt. Le gouvernement parodie Jacques Dutronc: « J’y pense et puis j’oublie… »
598 jours. C’est le temps qui reste à la planète et aux politiques avant le début de la 18 ème conférence sur le climat qui se tiendra prés de Paris, au Bourget, à partir du 30 novembre 2015. Comme le temps passera très vite pour la montée inexorable du dérèglement climatique, fait de réchauffement, de tempêtes, de froid inattendu et de graves variations pluviométriques, et d’erreurs d’appréciation, il est déjà temps d’en tenir une chronique politique, scientifique et économique. Le lecteur trouvera donc régulièrement ici les informations, bonnes ou mauvaises, liées au réchauffement de la planète et à la froideur ou à l’indifférence des politiques.
Le rapport du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) a été publié le 31 mars dernier. Il n’a colonisé les médias, bien modestement, que pendant deux ou trois jours. Annonçant, il faut espérer que la plupart des Français ont lu et entendu ce nouvel avertissement, des sécheresses, des famines, des inondations, des déplacements de population, des conflits et des pénuries alimentaires liés aux effets du dérèglement climatique. Lequel, confirme le rapport, est provoqué ou entretenu par les activités humaines et la « production » de plus en plus importante de gaz à effet de serre. Bref, ça ne s’arrange pas…
Qui a lu ou lira les 40 pages produites après des années de mesures, de modélisation et de réflexion par cet organisme créé en 1988, les deux premiers rapports datant de 1990 et 1995 ? Il faut dire que ces experts sont particulièrement maladroits : on ne publie pas un rapport d’importance planétaire le lendemain des élections municipales françaises! Quel manque de tact ! On ne publie pas un avertissement angoissé pour le monde en plein remaniement gouvernemental, cela ne se fait pas, ces gens n’ont vraiment aucun sens politique ! Alors, en France, mais aussi dans d’autres pays, le rapport du GIEC a été prestement englouti dans les profondeurs du classement des infos importantes. A la poubelle les mauvaises nouvelles, place aux dissertations sur le nouveau poste d’Harlem Désir, sur la polémique entre Sapin et Montebourg. Seul Stéphane Paoli reviendra dimanche pendant une heure à France Inter sur le réchauffement escamoté. Un journaliste qui sait fouiller dans les poubelles de l’Histoire pour y retrouver les bons sujets oubliés ou expulsés par le tourniquet de l’info…
Pourtant, alors qu’en France et ailleurs, c’est « business as usual » , alors qu’à Paris le monde politique et écolo, se passionne pour les états d’âme des Verts et du Front de gauche, le réchauffement se poursuit…
-Aux Etats Unis, un économiste-chercheur du Massachusetts, Matthew Ranson, a eu la curiosité de se pencher sur les taux quotidien de criminalité de 3000 comtés du pays et sur les courbes de température. Il s’est rendu compte, après étude des chiffres entre 1980 et 2009, que l’augmentation du taux de criminalité coïncidait parfaitement avec les températures les plus hautes…
-Une étude de la Banque Asiatique de Développement, publiée il y a quelques semaines fait apparaitre que d’ici à 2030, l’aéroport international de la capitale de l’Indonésie, construit à cinq kilomètres de la côte, sera submergé par la mer. Une submersion qui fera disparaitre 1500 iles du pays d’ici à 2050. Quand aux pêcheurs, ils ont d’ores et déjà du mal à survivre car ils sont de moins en moins capables de prévoir les brusques changements de temps et de comprendre les mouvements des poissons désorientés par le réchauffement. Leurs pêches sont donc de plus en plus aléatoires et réduites.
-Le Lac Tchad, tout prés de la capitale du pays Ndjamena, continue de s’assécher et n’abrite pratiquement plus de poissons alors qu’il faisait vivre toute une région. En 1973, sa surface était de 25 000 kilomètres carrés. Aujourd’hui ne reste plus que 2000 kilomètres carrés d’eau douce peu profonde et boueuse autour de milliers d’iles. Il y a quelques jours, les pays riverains affectés par cette disparition annoncée, se sont réunis à Rimini en Italie pour exposer leur demande de 800 millions d’Euros à l’Europe et à la FAO pour réhabiliter ce lac qui a perdu 90 % de sa surface en une cinquantaine d’années. Il n’est pas certain que l’on puisse faire pleuvoir avec des millions ; et pour économiser l’émission de gaz à effet de serre, cette réunion aurait pu avoir lieu sur place…
Ce sera tout pour cette fois, mais je pourrais aligner et détailler des exemples sur des pages et des pages. Le réchauffement et le dérèglement climatique ne sont plus que des faits-divers régulièrement emportés par une tempête médiatique incontrôlable soufflant tous les jours en toutes direction, tellement l’univers médiatique est en surchauffe et se dérègle. Certaines informations n’atteignent jamais la surface des medias, les dépêches qui le véhiculent restant lettre morte. Le gouvernement ? Comme le chanta Jacques Dutronc en 1966 : « J’y pense et puis j’oublie ». Mais à cette époque, il n’y avait que 800 millions de Chinois, 80 millions d’Indonésiens et 900 millions de crève-la-faim….
Evolution du Lac Tchad
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