Budget : L’Europe ou les frondeurs

Inflexible, le gouvernement est prêt à lâcher des pans de notre modèle social contre un feu vert de Bruxelles.

Michel Soudais  • 23 octobre 2014 abonné·es

Le débat sur la partie « recettes » du budget de l’État, qui s’est achevé mardi à l’Assemblée nationale, a une nouvelle fois mis en lumière la fragilité du gouvernement. À plusieurs reprises, ce dernier a dû demander la réserve des votes pour empêcher l’adoption d’amendements déposés par les socialistes frondeurs, leurs collègues EELV ou du Front de gauche. Ce mécanisme, contesté par le PS quand l’UMP y recourait, permet de reporter l’ensemble des votes à une date ultérieure, et donc de s’assurer une majorité en jouant sur le nombre de députés présents dans l’hémicycle. Il a donné lieu à des échanges aigres-doux entre le clan gouvernemental et les frondeurs, hostiles à cette « procédure un peu exécrable », lesquels ont reçu l’appui d’autres socialistes, comme Yann Galut, qui la jugeaient « pas admissible ».

Cette « absence de dialogue » a renforcé la motivation des frondeurs à s’abstenir sur un budget dont ils estiment, sur le fond, qu’il procède « à des économies à l’aveugle et à des dépenses mal ciblées ». Confortés dans leur démarche par Martine Aubry, ils contestent les 21 milliards d’euros d’économies, dont 3,7 milliards au détriment des collectivités locales, alors que la France connaît une croissance atone avec un risque de déflation. Ils auront encore l’occasion de le dire dans la discussion sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui a commencé. Les économies sur la branche famille et la modulation des allocations familiales suscitent en effet de vifs débats au sein de la gauche. Viendra ensuite l’examen de la partie « dépenses » du budget de l’État, moins conflictuelle, avant un vote global en première lecture le 18 novembre. Dans l’intervalle, la Commission européenne se sera prononcée.

Ni Emmanuel Macron – il l’a dit dimanche – ni le gouvernement d’Angela Merkel ne jugent « imaginable » que la Commission retoque le budget de la France. Selon l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, Berlin aurait donc décidé d’aider le gouvernement français à élaborer un « pacte écrit », une vieille lubie de Mme Merkel, détaillant les réformes structurelles que Paris s’engagerait à mener en échange d’une bienveillance de Bruxelles sur ses déficits. Le voyage à Berlin, lundi, de nos deux ministres de l’Économie n’avait donc rien du conte de fées que l’on nous a narré.

Politique
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