Pergélisol : Une bombe en sous-sol

En Arctique, selon plusieurs études, la fonte du pergélisol accélère dangereusement le réchauffement climatique.

Claude-Marie Vadrot  • 12 février 2015 abonné·es
Pergélisol : Une bombe en sous-sol
© Infographie : source : UNEP / Ramis/Handyside gil/abm/dmk/AFP

Illustration - Pergélisol : Une bombe en sous-sol


Depuis des mois, des équipes de scientifiques franco-canadiens et russes constatent que le pergélisol (partie d’un sol gelé en permanence), en anglais permafrost, de l’Arctique est de plus en plus parsemé de monticules ou d’énormes excavations. Des déformations causées par des dégagements brutaux de méthane et de gaz carbonique fossile, deux gaz à effet de serre prisonniers depuis des millénaires d’un sol qui, normalement, ne dégelait l’été que sur deux mètres au maximum. Le Journal du CNRS  [^2] publie un reportage sur le travail de ces chercheurs dans le Nord-Canada, terre des Inuits, qui, au sens propre du terme, fait froid dans le dos. Le pergélisol recouvre un quart des terres émergées de l’hémisphère nord, et sa fonte rapide libère d’immenses quantités de gaz qui pourraient, si la totalité était rejetée dans l’atmosphère, porter le réchauffement global de la planète à 5 à 8 °C d’ici à la fin du siècle. Loin des 2 °C « acceptés » par la communauté internationale, et près de l’estimation la plus pessimiste, 4,5 °C, livrée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) dans son dernier rapport.

Sous la conduite de Florent Dominé, du laboratoire franco-canadien de Takuvik ^3, les envoyés spéciaux du CNRS ont découvert l’ampleur du désastre : « 1 700 milliards de tonnes de carbone d’origine végétale se sont accumulées depuis la dernière glaciation. Deux fois plus que n’en contient actuellement l’atmosphère. » À l’appui de ses inquiétudes, le directeur de recherche précise qu’au Nunavik, territoire autonome des Inuits, autrefois nommé le Nouveau-Québec, la température du sol mesurée à 4 mètres de profondeur a augmenté de 2° C entre 1992 et 2010. D’où l’accélération de la fonte des sols gelés, qui précipite le réchauffement et provoque la destruction des infrastructures (maisons, routes, pistes d’aviation, installations industrielles…) dont les fondations reposent sur le pergélisol. Même observation dans le nord de la Sibérie : des maisons et des immeubles s’écroulent, des gazoducs et des oléoducs sont tordus par les mouvements du sol et des trous se forment. Cette situation a été décrite par le Siberian Times  ^4 dans un reportage effectué avec des scientifiques russes. Certaines des excavations présentent une profondeur de plus d’une centaine de mètres, leur largeur allant jusqu’à 70 mètres. Des images (voir Politis.fr) qui illustrent la gravité de la situation.

[^2]: Dans son n° 275, 26 janvier, voir https://lejournal.cnrs.fr

[^3]: www.takuvik.ulaval.ca 

[^4]: www.siberiantimes.com

Écologie
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