La subversion par le potager
À Dijon, des dizaines de militants ont réactivé la zone maraîchère des Lentillères, où s’invente un mode de vie alternatif. Une ZAD en pleine ville qui défie un projet immobilier de la municipalité.
dans l’hebdo N° 1391 Acheter ce numéro

Dix ans de maraîchage : elle se dit « à la retraite », Lucie, dos cassé, moralement essorée par une expérience professionnelle éprouvante. Quarante ans, une fille de 7 ans, elle a débarqué il y a deux mois aux Lentillères, à Dijon. Une « zone à défendre » (ZAD) ? « On préfère dire Quartier libre. On est en pleine ville », justifie Gaël.
En 2010, la municipalité annonce la construction d’un écoquartier sur cette aire, pour moitié une ancienne zone de production légumière ensauvagée de dix hectares. « Écoquartier ? Donc avec du bio-ciment et de l’éco-bitume ? », raille un militant. Sur le projet initial, quelques micro-taches vertes sont concédées au milieu d’immeubles de bureaux et d’habitation. Résistance au bétonnage, sauvetage du dernier vestige de la ceinture verte nourricière de Dijon : un large collectif d’opposition se constitue.
Le 28 mars de la même année, des dizaines de militants envahissent les lieux et défrichent dans la journée un hectare de terrain pour faire naître le Potager collectif des Lentillères (le Pot’col’le). Aujourd’hui, le Quartier libre cultive quatre hectares de légumes et abrite près de soixante-dix personnes vivant dans des habitats mobiles ou des maisons expropriées. Lucie entend bien y revivre, « parmi les petits jeunes ». Elle raconte à grand traits son « enfer chez le FN », près d’Auxonne (Côte-d’Or), où la chambre d’agriculture avait trouvé à l’installer, une manière de «