Nouveau débat sur l’ouverture de la PMA

130 médecins emmenés par le gynécologue René Frydman visent à faire évoluer la loi encadrant la procréation médicalement assistée.

Politis  • 23 mars 2016
Partager :
Nouveau débat sur l’ouverture de la PMA
© Photo : PHANIE / AFP

L’intitulé peut surprendre. « Nous, médecins, avons aidé des couples homosexuels à avoir un enfant même si la loi l’interdit. » Calqué sur le « Manifeste des 343 salopes » de 1971, cet appel, lancé dans Le Monde du 17 mars par 130 médecins emmenés par le gynécologue René Frydman, vise à faire évoluer la loi encadrant la procréation médicalement assistée, comme son illustre prédécesseur avec celle interdisant l’avortement. Courageux ? Pas pour Jean-François Mattéi. Selon l’ancien ministre de la Santé, le parallèle avec les « 343 salopes » n’est pas « juste » : « Les signataires étaient des femmes qui exprimaient elles-mêmes leur détresse d’avoir dû avorter dans des conditions très difficiles. Ici, il s’agit de médecins […] qui se sont mis hors-la-loi pour réclamer une évolution législative… » (La Croix).

L’ouverture de la PMA aux couples de femmes est un projet sans cesse reporté depuis 2012. Le gouvernement de François Hollande campant sur la ligne : le mariage pour les couples homosexuels, oui ; la procréation, non. Car, derrière l’ouverture de la PMA, pourrait se profiler l’autorisation des mères porteuses. « Effet de ras-le-bol et d’accumulation face à la souffrance des patientes […] et à notre difficulté à trouver des solutions à leurs problèmes en France », explique René Frydman.Dans le manifeste du 17 mars, quatre points sont évoqués derrière l’égalité des droits : dédommager les donneuses d’ovocytes ; procéder à l’analyse génétique de l’embryon avant transfert utérin ; permettre l’auto-conservation de ses ovocytes ; et le don de sperme pour femme célibataire.

« Gare aux simplifications excessives ! », prévient Jacques Testart, père avec René Frydman du premier bébé-éprouvette. Pour ce biologiste, l’argument principal des 130 signataires – « Ça se fait ailleurs » – est insuffisant. « L’escalade des exigences est argumentée comme une course sans limite. » Il plaide pour l’ouverture d’un « débat citoyen » sur l’assistance médicale à la procréation (AMP), débat qu’il estime monopolisé par des discours libéraux et des praticiens également motivés par le développement de leurs activités. Il met en garde contre les dérives du diagnostic préimplantatoire : depuis 1999, il propose que la vérification d’anomalies génétiques porte sur une seule pathologie par couple afin de ne pas ouvrir la porte à des pratiques eugénistes, quand l’avortement thérapeutique reste « le choix de la femme ». « Le manifeste rappelle que la bioéthique est l’art de poser les limites », souligne Jacques Testart, qui défend une position « de gauche, humaniste et laïque ».

Société
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

À Paris, des mères rassemblées pour les enfants de Palestine
Reportage 16 juin 2025 abonné·es

À Paris, des mères rassemblées pour les enfants de Palestine

Des dizaines de mères, accompagnées pour nombre d’entre elles de leurs enfants, se sont réunies aux Invalides ce 15 juin pour pousser Emmanuel Macron à agir face au génocide et à la tragédie que vivent les enfants encore vivants à Gaza.
Par Hugo Boursier
Expulsion forcée des Roms à Villeron : six habitants, dont le maire, devant le tribunal
Enquête 16 juin 2025 abonné·es

Expulsion forcée des Roms à Villeron : six habitants, dont le maire, devant le tribunal

Six habitants de cette commune du Val-d’Oise, dont le maire, sont aujourd’hui jugés devant le tribunal correctionnel de Pontoise pour « voie de fait, destruction de biens et violences à caractère raciste ». En février 2023, ils avaient participé à une manifestation violente pour expulser des Roms, installés dans le bois de la commune.
Par Pauline Migevant
Guyane : l’interminable attente des réfugiés haïtiens
Enquête 11 juin 2025 abonné·es

Guyane : l’interminable attente des réfugiés haïtiens

À Cayenne, des ressortissants d’Haïti fuient l’effondrement de leur pays. Face à des délais de traitement de leur dossier démesurés, leurs demandes d’asile et leurs vies sont suspendues à une administration débordée.
Par Tristan Dereuddre
Claire Hédon : « En Guyane, le droit d’asile n’est pas respecté »
Entretien 11 juin 2025 abonné·es

Claire Hédon : « En Guyane, le droit d’asile n’est pas respecté »

Dans la région d’outre-mer, les demandeurs d’asile attendent jusqu’à deux ans pour accéder à un simple rendez-vous en préfecture, légalement censé être obtenu sous trois jours. La Défenseure des droits, Claire Hédon, dénonce des atteintes aux droits fondamentaux et appelle les acteurs locaux à saisir son institution.
Par Tristan Dereuddre