Tribunaux arbitraux : les États à l’amende

Le Ceta crée un tribunal arbitral pour soumettre les États aux intérêts des multinationales.

Erwan Manac'h  • 12 octobre 2016 abonné·es
Tribunaux arbitraux : les États à l’amende
© Photo : RONALD WITTEK / DPA / AFP

La plupart des quelque 3 000 traités de commerce bilatéraux signés dans le monde comprennent déjà un tribunal arbitral, dont le Ceta s’est inspiré : des « experts » (souvent avocats d’affaires), saisis par une multinationale, tranchent des litiges au regard des accords de libre-échange. Le processus suffit parfois à faire changer une loi et peut aboutir à des condamnations ubuesques. Voici une somme d’exemples des décisions rendues par les cours arbitrales déjà existantes.

• Le chimiquier américain Ethyl Corporation a fait condamner le Canada à 13 millions de dollars de compensation en 1998, à la suite de l’interdiction d’un composant neuro-toxique qu’il commercialise comme additif à l’essence (le MMT), en vertu de l’accord de libre-échange avec les États-Unis (Alena). L’interdiction a finalement été levée.

• Pour avoir dévalué le peso, l’Argentine a écopé de 980 millions de dollars de dommages envers cinq entreprises.

• Une baisse des tarifs de l’électricité a valu au Guatemala une condamnation à 25 millions de dollars de compensation à l’électricien américain Teco, en 2013.

• Un tribunal d’arbitres a annulé en août 2016 la condamnation du pétrolier américain -Chevron par la justice équatorienne, après trente ans de pollution en Amazonie.

• La ville de Hambourg (Allemagne) a dû « adapter » ses normes environnementales face à la menace de poursuites de l’énergéticien suédois Vattenfall, qui contestait les restrictions écologiques imposées à l’une de ses centrales à charbon.

• La province d’Ontario (Canada) a dû renoncer à ses subventions aux entreprises locales de la transition énergétique, condamnée par l’OMC à la suite d’une plainte du Japon et de l’Union européenne.

Les affaires en cours d’instruction :

• L’entreprise LonePine (Canada) réclame 250 millions de dollars au Québec à la suite du moratoire sur la fracturation hydraulique, technique polluante d’extraction du gaz de schiste.

• Le pétrolier canadien TransCanada réclame 15 milliards de dollars aux États-Unis, qui n’ont pas autorisé son projet d’oléoduc « KeyStone XL ».

• Près de trente plaintes ont été recensées contre l’Espagne lorsqu’ont cessé les aides à l’énergie solaire.

Économie
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