« Vous m’arrêtez ? Je recommencerai »
En dépit de l’abrogation du délit de solidarité en 2012, des militants et de simples citoyens sont toujours poursuivis pour avoir aidé des sans-papiers. Trois d’entre eux témoignent.
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En vigueur depuis 1945, le délit de solidarité semblait appartenir à une autre époque. Médiatisé en 2009 grâce au film Welcome, de Philippe Lioret, il est supprimé en 2012 afin de ne traquer que les passeurs. Dans la réalité, c’est un flou juridique qui s’installe.
La loi précise que « toute personne -physique ou morale sans but lucratif qui porte assistance à un étranger, lorsque cette aide n’a d’autre objectif que d’assurer des conditions de vie dignes à l’étranger », échappera aux cinq ans d’emprisonnement et à l’amende de 30 000 euros. Une « immunité humanitaire » plaidée par de nombreux avocats, obligés de prouver la bonne foi de leur client. Pour y avoir droit, il faut remplir tous les critères : aucune contrepartie, préserver la dignité ou l’intégrité physique de la personne, fournir seulement des prestations de restauration, d’hébergement, de soins médicaux ou de conseils juridiques. Mais le cumul de ces éléments tend vers des interprétations législatives approximatives, profitant peu souvent aux gestes solidaires.
Ainsi, mercredi 23 novembre, Pierre-Alain Mannoni était jugé pour avoir pris trois -Érythréennes en stop. Professeur à l’université Nice Sophia-Antipolis et chercheur au CNRS, il n’appartient à aucune association. Le procureur de la République de Nice a requis « un sévère avertissement » de six mois de prison avec sursis. Le jugement a été mis en délibéré au 6 janvier 2017, tandis que d’autres procès doivent se tenir pour les mêmes preuves