La NASA alerte sur le réchauffement, Trump veut couper ses budgets

Tandis que l’agence spatiale américaine alerte dans deux études sur l’impact de la fonte des glaces du Groenland, la majorité républicaine annonce son intention de supprimer son programme d’étude du changement climatique.

Claude-Marie Vadrot  • 27 février 2017 abonné·es
La NASA alerte sur le réchauffement, Trump veut couper ses budgets
© Photo : MICHAEL KAPPELER / POOL DDP / ddp images/AFP

Lorsque les scientifiques de la NASA qui se préoccupent du dérèglement du climat ont lancé en 2015 une mission de surveillance de la fonte des glaces du Groenland, ils ignoraient au moins deux choses. D’abord, que leurs découvertes dépasseraient rapidement leurs pires cauchemars climatiques. Et ensuite, que Donald Trump et la clique de climatosceptiques qui l’entoure leur annonceraient deux ans plus tard qu’il fallait « rééquilibrer » les budgets en faveur de la recherche spatiale, considérant que la NASA n’a pas lieu de mener des études sur les questions climatiques.

La mission, baptisée OMG pour « Oceans Melting Greenland », a mobilisé une flottille d’avions, des dizaines de bateaux, des centaines de balises fixes ou mobiles, des drone et quantité de stations d’observation. Le groupe de travail, dirigé par l’océanographe Josh Willis, spécialiste de la montée du niveau des mers, a bénéficié de la coopération de nombreux chercheurs universitaires américains, danois et canadiens. Tout cela a permis d’aboutir très vite à des résultats scientifiquement incontestables.

La plus grosse contribution à la montée des mers

Les premières conclusions de deux études publiées en janvier dernier, dans un numéro spécial de la revue Oceanography(à lire en anglais ici et ), sont inquiétantes. Elles ont d’ailleurs fait l’objet – vérification particulière pour un sujet sensible dans une période politique spéciale – de plusieurs relectures par des scientifiques indépendants.

Première constatation : la fonte des glaciers terrestres du Groenland constitue actuellement la plus grosse contribution au monde à l’élévation des eaux océaniques. Elle est en effet estimée, pour cette seule île, à une moyenne de 1 millimètre par an.

Autre constat : dans les conditions actuelles du réchauffement, la disparition d’une grande partie de la glace groenlandaise pourrait entraîner, à terme, une montée des mers de 7,36 mètres ! Ce résultat rejoint l’estimation de 7 mètres que le Groupement intergouvernemental pour l’étude du climat (Giec) avait établie en 2015.

Des glaciers de 3 kilomètres d’épaisseur

Pour comprendre ces chiffres, il faut savoir que l’épaisseur de la couche gelée installée sur le Groenland est en moyenne de 2,5 kilomètres – elle peut atteindre 3 kilomètres dans le nord de l’île –, résultat de l’accumulation des chutes de neige depuis des millénaires. Ces amas gelés perdent chaque année au moins une centaine de kilomètres cubes de glace.

Les mers sont également alimentées par l’écoulement d’énormes lacs souterrains qui se forment depuis une vingtaine d’années sous les glaciers. Les deux lacs formellement identifiés par les chercheurs couvrent chacun une dizaine de kilomètres carrés. Comme les autres lacs, ils entraînent une circulation d’eau vers la mer ; ils contribuent chaque été à une accélération invisible de la fonte de la couche de glace.

Dans leurs deux études, les scientifiques énumèrent toutes les conséquences envisageables de ce phénomène, de la perte de salinité des mers au changement des espèces de poissons, en passant par la modification durable du régime des précipitations dans l’hémisphère Nord et par la disparition d’une grande partie des mammifères marins de la région arctique.

Les chercheurs de l’opération OMG ne savent pas encore à quelle vitesse la fonte va se poursuivre ni si une accélération du phénomène est proche. Ils espèrent pouvoir apporter une réponse précise à cette question dans un ou deux ans. Mais seulement si l’administration de Donald Trump ne leur interdit pas de mener à bien leurs travaux…