Le Front national en échec

L’abstention et la démobilisation de ses électeurs ramènent le parti de Marine Le Pen au moins cinq ans en arrière.

Michel Soudais  • 14 juin 2017 abonné·es
Le Front national en échec
© photo : RAYMOND ROIG / AFP

Depuis Hénin-Beaumont, où elle a pris la parole après l’annonce des premiers résultats, Marine Le Pen n’avait pas de quoi pavoiser. Son électorat étant celui qui s’est le plus abstenu lors de ce premier tour des législatives, le Front national enregistre un revers de grande ampleur. Il ne retrouve que 39 % des 7,67 millions de voix qui s’étaient portées sur sa candidate au premier tour de la présidentielle ; elle avait alors obtenu 21,3 %.

Avec un score national de 13,2 %, le parti d’extrême droite enregistre même un tassement par rapport aux législatives de 2012 (13,6 %) : ses candidats y avaient rassemblé 3,5 millions de voix, contre 2,99 millions dimanche. Plusieurs figures frontistes ont d’ailleurs été balayées dès le premier tour, tels Nicolas Bay, numéro trois du parti et patron de la campagne des législatives, en Seine-Maritime, Jean-Lin Lacapelle, secrétaire général adjoint du parti, dans la circonscription de Marignane-Vitrolles (Bouches-du-Rhône), ou le comédien Franck de Lapersonne dans la Somme.

Le FN, qui rêvait il y a peu de faire entrer à l’Assemblée nationale une cinquantaine de députés, ne paraît pas en mesure d’obtenir les quinze élus requis pour constituer un groupe parlementaire, d’autant que la forte abstention réduit à quasi-néant les triangulaires qui lui avaient permis de remporter ses deux circonscriptions en 2012. Si ses candidats sont qualifiés pour le second tour dans 119 circonscriptions, seuls vingt d’entre eux sont arrivés en tête. Opposés dans l’immense majorité des cas à des candidats de La République en marche (LREM), ils auront bien du mal à s’imposer, faute de réserves de voix.

Six candidats seulement semblent disposer d’assez d’avance sur leur adversaire pour l’emporter. C’est le cas de Marine Le Pen, qui, avec 46 %, devance de 26 points le candidat LREM dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais. Dans ce département, José Evrard à Lens et Bruno Bilde à Liévin ont, eux, 15 points d’avance, et Ludovic Pajot 11 à Bruay-la-Buissière. Sébastien Chenu à Valenciennes-sud (Nord) et Emmanuelle Ménard, l’épouse de Robert Ménard, à Béziers (Hérault) ont également creusé un écart de 15 et 11 points. La situation est nettement plus compliquée en revanche pour Gilbert Collard, Louis Aliot (Pyrénées-Orientales), Florian Philippot (Moselle) et Stéphane Ravier (Bouches-du-Rhône).

Cette contre-performance ne va pas aider à pacifier le débat interne sur la « refondation » du FN, apparu après la présidentielle et le score de Marine Le Pen au second tour, perçu comme mauvais par de nombreux cadres, qui incriminent la position de leur parti sur l’euro et la prestation ratée de leur candidate lors du débat télévisé de l’entre-deux tours. Le congrès prévu pour la fin de l’année s’annonce tendu.