Européennes : coup dur pour La France insoumise

Le résultat est un choc : la liste LFI menée par Manon Aubry ne devrait récolter que 7 % des suffrages aux élections du 26 mai.

Agathe Mercante  • 26 mai 2019
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Européennes : coup dur pour La France insoumise
© crédit photo : GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

I l pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville », disait Verlaine. Ce dimanche 26 mai, les mines des quelques insoumis qui s’étaient rendus au Belushi’s, à côté de la gare du Nord à Paris, pour assister à la soirée électorale organisée par La France insoumise sont aussi grises que le ciel parisien. Selon les premiers sondages de sortie des urnes, la liste portée pour les élections européennes par Manon Aubry, l’ancienne porte-parole d’Oxfam, n’a récolté que 7 % des voix (1), contre 12,5 % pour Europe Écologie-Les Verts, que les insoumis souhaitaient pourtant dépasser.

Déception à plusieurs titres

« Bien sûr, ce résultat est décevant », a concédé Manon Aubry, dans une très courte allocution à la presse. « C’est un pas de plus dans la crise politique que nous traversons », a-t-elle expliqué, déplorant le très (trop) haut score récolté par le Rassemblement national (23%) : l’« extrême marché » a nourri l’extrême droite, a-t-elle, en substance, indiqué. À 20h30, le leader des insoumis, Jean-Luc Mélenchon, a lui aussi pris la parole. « Notre résultat n’est pas à la hauteur de nos efforts », a-t-il ajouté, sans s’étendre beaucoup plus.

Pour les insoumis, le coup est rude. Parce que ce résultat est loin des estimations calculées par leurs sondages internes – qui leur promettaient un score autour de celui des dernières élections législatives : 11,3 % – d’abord ; ensuite, parce qu’en dépit de la hausse de la participation des électeurs – à 43,2 % à 17 heures – ceux de La France insoumise, les plus susceptibles de ne pas se rendre aux urnes, ne se sont en effet pas déplacés. Parce que les socialistes, menés par Raphaël Glucksmann, les talonnent, enfin. « On a commencé notre campagne en décembre alors que d’autres ont dévoilé leur liste il y a deux semaines », déplore une militante.

Incertitudes sur l’avenir du groupe au Parlement européen

Et en Europe, les résultats ne s’annoncent guère meilleurs. Alors que les insoumis et leurs alliés d’autres pays ambitionnaient, une fois au Parlement européen, de réformer le groupe parlementaire de la Gauche unitaire européenne (GUE), Die Linke, le parti de gauche radicale allemand n’a décroché que 5,5 % des voix. Et si les résultats des élections espagnoles se font attendre (les bureaux de votes ferment à 22 heures), ils ne semblent pas être en mesure d’améliorer les choses. « Podemos devrait avoir 7 ou 8 députés », estime Younous Omarjee, eurodéputé français sortant et reconduit (il était 4e sur la liste).

Calfeutrés dans une salle surplombant le bar du Belushi’s, rares sont les cadres de La France insoumise à s’être risqués à sortir. Les quelques-uns qui l’ont fait se voulaient optimistes. « On n’est pas du style à se lamenter », affirmait Leïla Chaïbi, troisième sur la liste. « On fera à 6 ce qu’on aurait fait à 10 », veut-elle croire. Encore faut-il que leur 6e candidat (Emmanuel Maurel), accède au Parlement européen. Au vu des scores des autres partis, c’est encore incertain.


(1) Source Ipsos pour Radio France et France Télévisions


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