Christian Prigent : « Créer une sculpture sonore »
Avec Poésie sur place, Christian Prigent donne à entendre un des multiples genres auxquels il s’adonne : la performance. L’écrivain y explose la langue et les sons, mêlant le burlesque à l’inquiétude et attestant une nouvelle fois de l’amplitude de son œuvre.
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Écrivain et poète engagé dans tous les genres (poésie, roman, récit, essais…), appartenant aux mouvements d’avant-garde depuis la période de la revue TXT (1969-1993), qu’il a dirigée, Christian Prigent se livre régulièrement à des performances en public. Son nouveau livre, Poésie sur place, en témoigne, réunissant des textes et un CD où figure leur enregistrement par Christian Prigent seul ou avec la comédienne Vanda Benes. Il explique ici de quelle forme de spectacle la poésie performance relève et quels en sont les objectifs.
Qu’est-ce que la poésie performance ?
Christian Prigent : Au tournant des années 1980, il y a eu un engouement pour la lecture orale et la performance poétique, qui a cherché à se différencier de la poésie sonore [pratiquée par les lettristes (Isidor Isou) et les « poètes sonores » (François Dufrêne, Henri Chopin), la poésie sonore privilégie la phonétique aux dépens du sens, NDLR]. Le mot « performance » s’est imposé, dans l’esprit des performances du Living Theater et des happenings. C’est le festival Polyphonix, organisé par Jean-Jacques Lebel à Paris, qui mettait cela en avant. Hormis les stars américaines du mouvement beatnik (Allen Ginsberg, entre autres), y étaient invités les divers courants de l’avant-gardisme en France. J’en faisais partie. Ce fut une expérience violente. Quelques-uns des « poètes sonores », comme Bernard Heidsieck, avaient un grand professionnalisme de la mise en scène, de la maîtrise de la voix… Par rapport à eux, ce que des gens comme moi faisaient était assez bredouillant. Cela m’a confirmé que cette situation-là, sur scène, était spécifique, et qu’il fallait travailler pour faire en sorte que ces performances soient en elles-mêmes des objets d’art. Ce qui exige notamment d’affronter les questions techniques : le rapport au micro, la sensation du volume de la salle, etc.
C’est un spectacle qu’il s’agit de mettre au point…
Oui. Et d’en interroger le sens. Je ne voulais pas d’un spectacle strictement virtuose. Mon but était qu’il ait à voir avec la littérature, qui, selon moi, dit quelque chose, au sens plat du terme, c’est-à-dire qu’elle dit sémantiquement quelque chose. J’étais à la fois proche des « poètes sonores » et à distance.
Qu’est-ce qui guide l’écriture des textes composant ce recueil, Poésie sur place ?
La quasi-totalité des textes sont des commandes. Ce que ces textes sont dépend des
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