Ehpad : Paradis pour actionnaires

Ce qui jusqu’à présent relevait du lien social devient un produit d’appel pour les marques.

Antonin Amado  • 2 février 2022
Partager :
Ehpad : Paradis pour actionnaires
© Aurel

Le système, décrit avec une rigueur chirurgicale par le journaliste Victor Castanet dans Les Fossoyeurs, ne devrait étonner personne. Car le champ du grand âge est un terrain capitalistique chimiquement pur pour les acteurs de marchés. Ils peuvent y espérer des taux de rentabilité mirobolants, oscillant de 4 à 6 % annuels. Un paradis pour actionnaires voraces. Face au manque de contrôle des pouvoirs publics et devant l’absence de solutions de substitution, certains acteurs sans scrupule peuvent ainsi maximiser leurs marges de profit. Comment ? En rognant sur tous les postes de dépense : les budgets nourriture, couches ou activités par exemple. Le groupe Orpea, numéro 1 mondial du secteur, est gravement mis en cause dans cette affaire. Nous aurions tort d’adhérer à la communication d’un groupe avançant un « problème d’organisation » comme excuse et qui vient de licencier Yves Le Masne, son directeur général. Face à un émoi légitime, le Synerpa, principal syndicat des Ehpad privés, tente d’éteindre l’incendie et avance que tous ses membres ne font pas preuve d’autant de cynisme. Il appelle à une multiplication des contrôles et à la mise en place de certifications plus contraignantes. Des propositions loin de répondre aux attentes des familles et des résidents, fréquemment victimes de maltraitance. En pleine campagne présidentielle, l’affaire Orpea aura au moins eu cette vertu : replacer au cœur du débat un enjeu sociétal majeur pour les 20 prochaines années. Deux choix s’offrent à nous : s’en remettre collectivement à un système privé proposant des tarifs en moyenne 40 % plus élevés que les établissements gérés par des associations et des collectivités, le tout avec 15 % de personnels en moins. Ou bâtir un service public de la dépendance.

© Politis

Publié dans
Parti pris

L’actualité vous fait parfois enrager ? Nous aussi. Ce parti pris de la rédaction délaisse la neutralité journalistique pour le vitriol. Et parfois pour l’éloge et l’espoir. C’est juste plus rare.

Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Course de voiliers au large : l’aventure dans le typhon capitaliste
Parti pris 14 novembre 2025

Course de voiliers au large : l’aventure dans le typhon capitaliste

Le 6 novembre, en Martinique, le premier voilier de la Transat Café L’Or, traversée de l’Atlantique en double, a passé la ligne d’arrivée. Entre prouesses technologiques et budgets colossaux, la course au large est devenue une vitrine du capitalisme, où les skippers naviguent davantage sur les chiffres que sur l’océan.
Par Caroline Baude
Budget : l’impasse stratégique du parti socialiste
Parti pris 12 novembre 2025

Budget : l’impasse stratégique du parti socialiste

L’article sur la suspension de la réforme des retraites du projet de loi de financement de la Sécurité sociale sera examiné ce 12 novembre à l’Assemblée. Le PS, en quête d’un moment de gloire politique, a opté pour la stratégie de la magouille en votant pour la partie recettes du PLFSS dimanche dernier.
Par Lucas Sarafian et Pierre Jequier-Zalc
1995 : une révolte fondatrice
Luttes sociales 5 novembre 2025

1995 : une révolte fondatrice

Le mouvement social 1995 fut à la fois une victoire sociale et un basculement politique. Entre la résignation et la résistance, un monde s’est dessiné et nous vivons encore dans son sillage.
Par Benoît Teste et Pierre Jacquemain
Mamdani, la gauche qui réconcilie radicalité et réel
Parti pris 5 novembre 2025

Mamdani, la gauche qui réconcilie radicalité et réel

L’élection de Zohran Mamdani à la mairie de New York relève du séisme politique. Dans la ville la plus chère du monde, bastion du capitalisme financier, les nombreux électeurs ont porté au pouvoir un maire issu de la gauche de gauche, musulman, cible d’une campagne d’islamophobie médiatique jusqu’en France. Au-delà du symbole, cette victoire incarne le retour d’une gauche concrète et populaire.
Par Pierre Jacquemain