« Koulounisation », de Salim Djaferi : L’Algérie maux à mots

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Jean-Claude Renard  • 29 juin 2022 abonné·es
« Koulounisation », de Salim Djaferi : L’Algérie maux à mots
© Emmanuel Pierrot

oulounisation, le premier spectacle personnel de l’acteur, auteur, performeur et metteur en scène belge Salim Djaferi, aborde les relations entre France et Algérie d’une manière singulière. Lorsque nous l’avions découvert, dans le cadre du Passage Transfestival à Metz, en mai, nous parvenaient depuis longtemps déjà des échos de ce spectacle. Les spectateurs du Off, au Festival d’Avignon, où la pièce est reprise, comprendront eux aussi pourquoi Koulounisation résonne autant.

Ce (presque) seul-en-scène fait de toute tentative de récit une entreprise suspecte. En racontant Koulounisation, ne risque-t-on pas de reproduire l’attitude de ceux qui ont imposé leurs mots pour dire la colonisation, en parlant par exemple de « guerre d’Algérie » pour désigner ce qui était en réalité une révolution ? Salim Djaferi installe le doute, tout en douceur, à travers le récit généreux de sa propre enquête lexicale sur une domination dont il a hérité de manière lacunaire.

Endossant le rôle d’une sorte de Candide en Algérie – et en France, parmi les Algériens de sa connaissance –, l’artiste accueille dans sa réflexion de nombreuses paroles qu’il a récoltées durant sa longue période de recherche. La première de ces paroles est celle de sa mère, qui à sa question « Comment dit-on “colonisation” en arabe ? » répond : « koulounisation ». Surpris, et même mécontent de cette réponse qu’il prend pour le signe d’une violence qui perdure, Salim Djaferi trouve auprès de divers interlocuteurs d’autres vocables qu’il soumet eux aussi à une analyse précise. À travers cette approche vivante du langage, se dessine cette certitude : il faut prendre garde aux mots. Surtout lorsqu’ils sont posés sur des maux.

Koulounisation, Théâtre des Doms, Avignon (84), du 6 au 28 juillet à 12 heures, relâche les 12, 19 et 24 juillet. Tél. : 04 90 14 07 99. www.lesdoms.eu

Littérature
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