« L’Été de Jahia », rencontre sans frontières
Olivier Meys raconte l’amitié de deux adolescentes dans un centre pour réfugié·es.
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L’Été de Jahia / Olivier Meys / 1 h 31. En salle le 6 août.
En Belgique, à la campagne, dans un centre d’accueil de réfugié·es en attente de la décision concernant l’acceptation ou non de leur permis de séjour, une amitié se noue entre Jahia (Noura Bance) et Mila (Sofiia Malovatska), 16 ans toutes deux. La première a quitté son pays d’Afrique centrale en guerre en compagnie de sa mère, qui souffre de traumas psychiques, la seconde a fui avec sa famille la Biélorussie depuis l’invasion russe en Ukraine.
Le quotidien, c’est le désœuvrement – que le cinéaste, Olivier Meys, montre précisément dans ce centre à la fois impersonnel et indispensable où des existences s’accrochent à un espoir fragile. Jahia est de tendance pessimiste tandis que Mila est volontariste, décidée à avoir une belle vie, croqueuse des petits plaisirs comme celui de piquer une tête dans un lac alors que Jahia reste sur le bord.
L’une des qualités de L’Été de Jahia, deuxième long métrage du réalisateur belge après Les Fleurs amères (2018), est de ne pas suivre les chemins narratifs balisés. Si l’on pouvait imaginer que, des deux jeunes filles, Mila serait celle qui devrait se confronter à l’imminence d’un retour, la suite n’a rien d’attendu. Alors que Mila fuit la réalité plus ou moins malgré elle en s’enfonçant dans un mystérieux coma, Jahia se ressaisit et veut prendre les choses en main, parfois en dépit du bon sens, mais en s’affirmant toujours davantage.
Incertitude
Le film gagne en épaisseur alors que Jahia se trouve plus seule encore quand sa mère doit se rendre à l’hôpital pour y recevoir des traitements. Noura Bance, lycéenne dont c’est ici la première apparition à l’écran, au visage changeant comme la lumière sur un paysage, y est pour beaucoup, sachant alterner les failles et la solidité. Elle forme un beau duo avec Sofiia Malovatska, également débutante au cinéma. Céline Salette, en responsable du centre d’accueil, les accompagne harmonieusement.
L’Été de Jahia raconte au féminin la condition des exilé.es dans l’incertitude du sort qui leur sera réservé par le biais singulier d’une amitié entre deux adolescentes. Celle-ci devient un apprentissage de la vie, une école de courage et de générosité. C’est ainsi que le film s’avère aussi intense en émotion.
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