L’échec annoncé du budget
Les mesures d’austérité proposées par François Bayrou s’attaquent aux ménages les moins favorisés, ce qui aggravera les inégalités et la pauvreté.
dans l’hebdo N° 1878 Acheter ce numéro

La rentrée va être marquée par le débat sur le budget de rigueur pour 2026, préparé par François Bayrou et son gouvernement, avec l’objectif de 44 milliards d’euros d’économies sur les dépenses publiques. Il n’est en aucun cas question de remettre en cause les cadeaux fiscaux offerts par Macron et ses premiers ministres successifs aux entreprises et aux ménages les plus riches depuis 2017, dont le coût annuel s’élève à 62 milliards. Et qui, s’ils étaient abolis, ramèneraient le déficit public sous la barre des 3 % du PIB.
De même en est-il des aides publiques aux entreprises, qui coûtent 211 milliards d’euros par an au budget de l’État, dont les principales – le crédit d’impôt recherche et le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – ont fait l’objet d’évaluations critiques de la Cour des comptes.
En revanche, les mesures d’austérité proposées par François Bayrou s’attaquent aux ménages les moins favorisés, ce qui aggravera les inégalités et la pauvreté, en forte hausse ces dernières années. Parmi ces mesures, la lutte contre la fraude sociale, supposée rapporter aux caisses de l’État 2,3 milliards, vise les allocataires de prestations sociales, et en particulier les chômeurs, dont les allocations ont déjà été rabotées à trois reprises par les réformes de l’assurance chômage.
Or la fraude à l’assurance chômage ne représente que 110 millions, alors que la majeure partie de la fraude sociale, qui s’élève à 13 milliards, selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale, est le fait d’entreprises et de professionnels de santé, qui ne sont pas concernés par les mesures d’austérité.
Les annonces de M. Bayrou vont perpétuer la rupture du principe fondamental de l’égalité devant l’impôt.
G. Zucman
Pour faire bonne figure, le gouvernement Bayrou s’apprêtait à faire voter une « contribution de solidarité », variante de la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) instituée en 2025, qui vise à ce que les ménages dont les revenus dépassent 250 000 euros paient au moins 20 % d’impôt sur leurs revenus. Mais, en excluant la taxation du patrimoine, Bayrou et la macronie renoncent à réduire les inégalités et à faire payer les ultra-riches dont le patrimoine est la principale richesse.
Comme l’écrit Gabriel Zucman, promoteur d’une véritable taxe sur les riches et leur patrimoine :« Les annonces de M. Bayrou vont perpétuer la rupture du principe fondamental de l’égalité devant l’impôt. Elles consolident le triomphe de l’injustice fiscale et sociale. »
Il est éclairant de comparer la politique de Macron à celle menée par le gouvernement de gauche de Pedro Sánchez, qui a mis en œuvre une politique sociale ambitieuse, avec une hausse du salaire minimum, l’instauration d’un revenu minimum garanti, une réduction du temps de travail à 37,5 heures, une TVA réduite sur les produits de première nécessité, des aides publiques importantes aux investissements écologiques. Résultat : l’économie espagnole est beaucoup plus dynamique avec un PIB par habitant en hausse et un chômage en forte baisse.
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