À L’Attention De Monsieur Charb, Directeur Adjoint De La Rédaction De L’Hebdomadaire Comique «Charlie Hebdo» – Aux Bons Soins De L’Hebdomadaire Comique «Charlie Hebdo»

Sébastien Fontenelle  • 10 juillet 2009
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Illustration - À L'Attention De Monsieur Charb, Directeur Adjoint De La Rédaction De L'Hebdomadaire Comique «Charlie Hebdo» - Aux Bons Soins De L'Hebdomadaire Comique «Charlie Hebdo»

Monsieur.

L’hebdomadaire comique Charlie Hebdo publie ce matin une (courageuse) «pétition» pour l’abrogation de l’article L. 622-1 du Code pénal, qui permet de condamner à cinq ans de prison et 30.000 euros d’amende «toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France» .

Je lis, en cliquant ici, que l’hebdomadaire comique Charlie Hebdo a, si j’ai bien compris, un peu chouré cette pétition à l’hebdomadaire Siné Hebdo , et que vous auriez eu tort de vous gêner, puisque c’est «la guerre» [^2].

Je vais, je crois, signer cette pétition (courageuse), non tant pour elle-même, que pour l’incontestable qualité de ses premiers signataires.

Martine Aubry!

François Hollande!

Arnaud Montebourg!

Mais avant: je voudrais, si vous en avez le temps, que vous m’aidiez à éclaircir deux, trois zones d’ombre.

Ainsi, la suggestion que Charlie Hebdo fait à son lectorat de « signe(r) la pétition sur le site de charliehebdo.fr» [^3], me dérange un peu – car enfin, je vous le demande: «À part ceux qui» n’utilisent Internet «que pour bander, gagner en bourse et échanger du courrier électronique, qui est prêt à dépenser de l’argent à fonds perdus pour avoir son petit site personnel?»

Réponse: «Des tarés, des maniaques, des fanatiques, des mégalomanes, des paranoïaques, des nazis, des délateurs, qui trouvent là un moyen de diffuser mondialement leurs délires, leurs haines, ou leurs obsessions» .

Car: «Internet, c’est la Kommandantur du monde ultra-libéral. C’est là où, sans preuve, anonymement, sous pseudonyme, on diffame, on fait naître des rumeurs, on dénonce sans aucun contrôle et en toute impunité. Vivre sous l’Occupation devait être un cauchemar. On pouvait se faire arrêter à tout moment sur dénonciation d’un voisin qui avait envoyé une lettre anonyme à la Gestapo. Internet offre à tous les collabos de la planète la jouissance impunie de faire payer aux autres leur impuissance et leur médiocrité. C’est la réalité inespérée d’un rêve pour toutes les dictatures de l’avenir» .

Cela, n’est-ce pas, ce n’est pas moi qui l’affirme (je ne suis qu’un modeste copiste): c’est un homme dont la Pensée brille comme un phare dans la nuit de l’obscurantisme, et dont le nom est Val, Philippe Val, et dont chacun(e) sait que jamais il n’erre.

( «Valjaménère» , comme on dit au Berry pour conjurer le mauvais sort.)

Dès lors, et puisqu’aussi bien j’observe que vous n’utilisez pas le site charliehebdo.fr que pour bander, gagner en bourse et échanger du courrier électronique, mais aussi pour faire connaître votre (courageuse) pétition, je suis dans l’obligation, avant de la signer, de vous poser franchement la question: êtes-vous des tarés?

Ou des maniaques?

Ou des fanatiques?

Ou des mégalomanes?

Ou des paranoïaques?

Ou des nazis?

Ou des délateurs?

Comme le prétend Philippe Val?

Et à ce propos.

J’ai une autre question.

Je suis (un peu) comme vous: je n’aime pas beaucoup l’article L.622-1 du Code pénal.

Pour autant, je dirais que c’est plutôt la «politique d’immigration» que le chef de l’État français confectionne depuis l’époque où il n’était «que» ministre de l’Intérieur[^4], qui me pue au zen.

Je dirais que c’est plutôt cette obsession qu’il a – et que partagent, me semble-t-il, Martine Aubry, François Hollande, Arnaud Montebourg – de maîtriser-les-flux-migratoires.

J’ai le sentiment que c’est cette furieuse envie de maîtrise (fondée sur le fantasme typiquement réactionnaire que des centaines de milliards de miséreux sudiques vont nous déferler sur) qui induit nombre des saloperies de l’époque – dont, notamment, le harcèlement des sans-papiers et (par conséquent) le «délit de solidarité» contre quoi vous pétitionnez (courageusement).

Pour le dire autrement: si qu’on supprime la doctrine où d’aucun(e)s ancrent le délit, on supprime aussi le délit, CQFD, ma couille.

(Sinon c’est comme si on s’excitait sur le thermomètre sans rien tenter contre la fièvre – avant de japper, fi, 39°5, c’est bien de la température.)

Or.

J’ai lu.

Dans l’hebdomadaire comique «Charlie Hebdo» .

Le mercredi 3 octobre 2007.

Cette phrase, d’un homme dont la Pensée brille comme un phare dans la nuit de l’obscurantisme, et dont le nom est Val – Philippe Val: «Certes, il faut trouver des moyens de maîtriser l’immigration pour que tout le monde y trouve le meilleur compte possible» .

Où se trouve, presque mot pour mot, la finaude rhétorique d’un Brice Hortebesson.

Et donc, ma question: est-ce que vous allez continuer encore longtemps à nous prendre pour des idio(te)s?

[^2]: Et à la guerre, n’est-ce pas? Tous les coups, même bas, sont permis: c’est ce que les sentinelles de la doxa libérale vont énonçant depuis de looooongues années.

[^3]: Cette formulation est curieuse.

[^4]: Cette époque, remember , où il assurait Philippe Val de son absolu soutien dans son (courageux) combat contre l’obscurantisme des mahométans fanatisés

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