Le Noël de Véronique

Véronique, après 4 mois à la rue, habite depuis début décembre dans un petit meublé. Elle a pu fêter Noël au chaud…Voici son récit

Eloïse Lebourg  • 16 janvier 2015
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Le Noël de Véronique

Le 23 décembre, je suis allée à l’accueil de jour. En plus des habitués que je vois depuis plusieurs moi, j’y ai découvert des nouveaux, notamment un petit garçon avec sa maman qui dorment dehors. Nous avons fait notre réunion avec Eloïse. Nous étions nombreux. Après la réunion, une dame qui a pris connaissance de notre blog et de l’atelier d’écriture, est venue nous offrir des clémentines, des papillotes et un très bon gâteau. J’ai trouvé ça tellement gentil. Surtout, qu’en cette veille de Noël, nul d’entre nous a le moral.

Le 24 décembre, je suis allée faire mes courses. il a fait un temps splendide pour la saison. Quand je suis sortie du magasin, j’ai reconnu un homme que je croise à l’accueil de jour, il faisait la manche. Même si je dois faire attention à mes dépenses, je lui ai donné un euro. Ce n’est pas beaucoup, mais ça l’aidera un peu. Parfois, maintenant que j’ai mon chez-moi, je donne un paquet de gateau ou une tablette de chocolat. Mais il faut vraiment que je veille à mes économies. Je n’ai que le RSA pour vivre.

Aujourd’hui, 25 décembre, il fait moins beau. C’est Noël. Cette fête est bien pour ceux qui ont une famille, et surtout des enfants. Et puis ça fait un peu plus de bénéfices pour les commerçants. Moi, j’ai fait mon petit Noël, j’ai fini ma soupe à l’oignon, j’ai mangé des marrons, des champignons, une escalope, du fromage et des clémentines. J’ai aussi acheté une bûche pâtissière au café. Je regarde un film à la télé, au chaud. Je repense à mes nuits dehors. C’est triste de voir dans un pays démocrate et moderne des gens qui vivent dehors, tels des chiens abandonnés. Trop de gens sont égoïstes et ne comprennent pas que l’on puisse se retrouver à la rue. Ce qui m’inquiète, c’est la vie dans vingt ans: la pollution, les cancers, la misère. Pauvres enfants.

Nous sommes le 31 décembre, dernier jour de l’année 2014. Cette année n’aura pas été bonne. J’espère que celle qui arrive sera mieux. Il a un peu neigé dans certaines régions, tant mieux c’est bon pour les jardins et les microbes. Il faut un peu d’hiver. Mais, malheureusement, pour les gens de la rue, c’est l’horreur. En ce moment, il n’y a pas de place dans les hébergements d’urgence.
Quand on vit dans le luxe, on n’a pas le droit de se plaindre. Plus on en a plus on en veut. Alors qu’on devrait s’estimer heureux d’avoir au moins un toit sur la tête.

Je souhaite qu’en 2015, notre société soit plus humaniste, plus solidaire. Moins de misère. Plus de misère.

J’écris ce n’est pas que pour moi , c’est surtout pour les autres, qui eux n’ont pas eu la chance que j’ai eue de sortir de la rue. Ceux qui continuent à s’asseoir par terre, le regard pensif, tristes, un morceau de pain, une cigarette entre les doigts. On est assis, replié sur soi, on a froid. Trop d’entre eux sont jeunes. L’hiver dure trop longtemps, dans ces cas-là…
Vivement le printemps…

A l'atelier d'écriture (© Juan Alonso)

Publié dans
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Temps de lecture : 3 minutes
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