Sarkozysme ordinaire

Claude-Marie Vadrot  • 19 avril 2007 abonné·es

D’emblée, le ministre UMP délégué à l’Aménagement du territoire et ses camarades députés, dont le président du conseil général, ont prévenu les quelque trois cents seniors venus les écouter vanter les mérites de Nicolas Sarkozy dans la salle polyvalente de Gien (Loiret) : « Attention au retour vers le collectivisme. » Alors qu’à Paris son copain de campagne Brice Hortefeux se faisait (officiellement) gronder pour son clin d’oeil trop voyant à Jean-Marie Le Pen, Estrosi, lui, certain qu’il n’y avait pas de journalistes dans la salle, a parlé comme le leader du FN à un public qui ne demandait que cela. Avec une confidence qui fera chaud au choeur de Chirac : « Combien de fois, depuis cinq ans, Nicolas et moi, nous avons été humiliés, y compris au sein de notre parti. » Heureusement, « avant la fin du mois de juillet, nous aurons profondément changé le pays. Il est terminé le temps où les gens qui se lèvent à midi et vivent de l’assistanat font la loi. Ils vivent aux dépens de ceux qui se lèvent tôt. » Applaudissements nourris par une salle qui doit comprendre, à vue de nez, 80 % de retraités. Nouvelle salve pour la dénonciation d’une « société où l’on punit ceux qui travaillent une heure de plus et où tellement d’enseignants font une règle de l’absentéisme. »
Christian Estrosi explique l’immigration : « On vient chez nous, on profite de tout et ensuite, jackpot, bingo, on est régularisé. » Tout cela aux dépens, évidemment, de la sécurité, et il reprend à son compte l’histoire du resquilleur de la gare du Nord « 22 fois récidiviste et en situation irrégulière » , information depuis longtemps démentie par son ministre de l’Intérieur.

Puis, désignant par-dessus son épaule le camp des gens du voyage installés dans un champ derrière la salle municipale dans l’attente de leur pèlerinage chrétien et annuel dans un village voisin, il précise : « Ces gens-là doivent rendre des comptes, expliquer d’où viennent leurs caravanes et leurs grosses voitures. Nicolas Sarkozy au pouvoir les fera tous contrôler et expulser. » En oubliant évidemment d’expliquer comment on expulse des Français de leur pays. Avant une conclusion au cours de laquelle il explique que Ségolène Royal « va créer des milliers d’emplois de chefs de bande, de trafiquants et de passeurs clandestins. Madame Ségolène Royal, c’est le parti des voyous, et elle fait de la politique avec le Guide du routard ».

C’était une soirée électorale ordinaire dans une ville dont le maire, il y a quelques années, fut l’inventeur, par arrêté municipal, des arrestations de mineurs se promenant dans les rues le soir.

Politique
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