Inquiétudes pour le libre

Christine Tréguier  • 31 mai 2007 abonné·es

Après avoir dénigré les logiciels libres, mis en cause leur fiabilité et leur sécurité, Microsoft a fini par se résoudre, comme d’autres industriels de l’informatique, à passer quelques accords avec certains acteurs du libre. Mais il n’a pas cessé la guerre pour autant. Son directeur juridique, Brad Smith, vient en effet, dans le magazine Fortune, d’accuser ces «~concurrents déloyaux~» de quelque 235 violations de brevets (42 pour le noyau Linux ou encore 45 pour la suite bureautique Open Office) et de menacer de procès tous ceux qui se refuseraient à «~respecter les mêmes règles que l’ensemble du marché~» .

La déclaration ne semble pas avoir affolé les analystes, qui y voient une manoeuvre d’intimidation. Microsoft chercherait à dissuader les grands comptes d’acquérir des solutions libres (dont le marché a progressé de plus de 70~% depuis deux ans). Ou à les pousser vers celle commercialisée par Novell, avec qui il a signé une sorte de pacte de non-agression où chacun s’engage à ne pas poursuivre les clients de l’autre. La menace de procès en contrefaçon n’est pas nouvelle et fait sourire la communauté du libre, qui attend toujours une réponse à sa lettre ouverte intitulée «~Montre-nous le code~!~». Microsoft avait jusqu’au 1er mai pour désigner dans le code de Linux (ouvert, donc public) des logiciels libres ce qui violerait ses propres brevets. Brevets qui, rappelons-le, sont controversés aux États-Unis et n’existent pas en Europe. Enfin, pas encore…

La communauté française du libre s’inquiète, justement, d’une nouvelle offensive pour valider les brevets au niveau européen, et de la position qu’adoptera la France. Elle avait pris soin de demander aux candidats à la présidentielle de faire connaître leurs positions sur les brevets, ou encore sur les DRM (qui empêchent de lire CD et fichiers téléchargés sur des machines Linux). Parmi les réponses publiées sur candidats.fr, celle de Sarkozy, envoyée in extremis avant le premier tour. Il y défend les brevets, avec les arguments de la nécessaire protection et de l’encouragement à l’innovation et à l’investissement. Arguments largement récusés lorsqu’il s’agit de créations immatérielles comme le logiciel. Mais il les justifie aussi parce que « ~ des entreprises françaises expriment le besoin d’une clarification pour pouvoir bénéficier d’une protection plus étendue que celle que leur offre aujourd’hui le système du droit d’auteur ~ » . Les multinationales françaises et étasuniennes aux gros portefeuilles peuvent être rassurées : avec lui, tout est possible !

http://www.candidats.fr

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