À chaque université son univers

Si les universités populaires ont pour point commun la gratuité et l’accès libre, elles présentent néanmoins des différences d’approche.

Julie Azémar  • 12 juin 2008 abonné·es

Unir l’université avec le populaire, c’est réaliser une équation séduisante. Associés, ces deux mots sonnent d’abord comme un label citoyen. Et renvoient aussi à l’histoire – riche et ancienne – de l’éducation populaire. Mais, de l’Association des universités populaires de France (AUPF) à l’Université de tous les savoirs en passant par les structures d’ATD-Quart Monde ou le « réseau Onfray », cette appellation recouvre de nombreuses réalités. Tous ces lieux, ou presque, ont adopté le principe de la gratuité (même si certains demandent une cotisation en tant qu’associations) et de l’entrée libre, mais cela ne suffit pas à les rassembler dans une grande fédération.

Pour Denis Rimbaud, président de l’AUPF, les universités populaires « remplissent deux missions essentielles : relayer un savoir et le partager avec un public socialement élargi » . Refusant l’élitisme et le cours magistral, qui diffuse les savoirs de haut en bas, les universités de cette fédération fonctionnent sur la réciprocité : « L’apprenant peut devenir le professeur. Par exemple, les cours d’allemand sont donnés par des gens de la région dont c’est la langue maternelle. Et, à leur tour, ils s’inscrivent à d’autres activités. L’essentiel est de créer du lien social, de ne pas apprendre seul. Dans nos “UP”, il n’y a pas d’amphis, car le savoir n’est pas universitaire mais utilitaire » , précise Denis Rambaud. Yoga, mécanique, cours de chinois ou de russe, ces universités populaires souhaitent répondre aux besoins de la vie quotidienne, reprenant là une tradition héritée du XIXe siècle. Et le réseau qu’elles forment ne cesse aujourd’hui de se développer de ville en ville, mais aussi dans les campagnes afin d’être au plus près des gens.

L’université populaire de Saint-Denis se veut, elle, autonome. La Dionyversité revendique un caractère libertaire. Ses étudiants n’ont pas besoin de s’inscrire, d’adhérer à une association ni de donner leur nom. Chaque soir, à la Bourse du travail de Saint-Denis, les conférences sont assurées par des militants pour de futurs militants capables de développer une pensée critique et, à terme, de passer à l’action. Les thèmes, toujours engagés, sont liés aux problèmes de la société contemporaine : surveillance généralisée, critique des médias, prisons… Le cycle sur la désobéissance civile, abordé en avril dernier, a débouché sur du concret : certains de ses auditeurs ont ensuite ouvert un squat…

Quant aux universités populaires ATD-Quart Monde, elles suivent une démarche proche de celle de la Dyoniversité, en communiquant par exemple les thèmes à l’avance aux participants pour qu’ils préparent les interventions orales. Il s’agit de faire s’exprimer le public et de confronter autant que possible les points de vue. Les sujets traités sont choisis en fonction des intérêts, voire des besoins des personnes présentes : l’accès au logement, le droit du travail ou les questions de tutelle sont souvent les problèmes qu’elles rencontrent au quotidien et auxquels elles doivent faire face.
Ni identiques ni totalement opposées, toutes ces universités s’adressent le plus souvent à des publics avertis, et n’appartenant pas nécessairement – loin s’en faut parfois – aux classes populaires.

Société
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