Répondre à l’urgence sociale

Des organisations syndicales, associatives et politiques ont planché sur des alternatives pour sortir d’une crise économique qui pèse lourdement sur les populations les plus démunies.

Thierry Brun  • 13 novembre 2008 abonné·es

Les états-majors syndicaux ainsi que di­verses associations et organisations politiques ont multiplié les déclarations sur les alternatives pour sortir d’une crise économique qui provoque faillites d’entreprises et l’accroissement du chômage. Reçues à ­l’Élysée le 3 novembre pour être informées sur la préparation du sommet du G20, les trois principales organisations syndicales (CFDT, CFDT et FO) ont dénoncé « le grand écart » entre les propositions de régulation du système financier international et la dérégulation sociale prônée par le gouvernement de François Fillon.
Deux jours plus tard, huit organisations syndicales françaises (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, Solidaires, Unsa) se sont re­trouvées au siège de la CGT à Montreuil pour discuter de la situation et des perspectives de mobilisation. Elles sont convenues d’engager un travail commun pour présenter des revendications aux pouvoirs publics et au patronat, et elles poursuivront leurs échanges lors d’une prochaine réunion le 24 novembre. En attendant, les huit syndicats ont condamné « toute politique de déréglementation et de dérégulation économique et sociale. Elles interpellent le gouvernement et le patronat pour qu’ils prennent la mesure de la situation ».
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Parallèlement, les altermondialistes des Attac d’Europe, auxquels se sont joints des Attac d’autres continents, ont publié une déclaration commune sur la crise financière et les *« alternatives démocratiques »
. Intitulé : « Le temps est venu : sortons de l’économie casino ! », le texte souligne que « c’est l’ensemble du système financier sous sa forme néolibérale qui s’est avéré économiquement instable, inefficace et dommageable pour l’égalité, le bien-être général et la démocratie. Ce sont donc des changements systémiques qui s’imposent » . Cette volonté de changement a aussi inspiré un « appel à la mobilisation » lancé par le Collectif résistances et alternatives à la crise (Crac). « Rien n’est plus important aujourd’hui, pour les mouvements sociaux, que de proposer des formes d’actions concrètes, spectaculaires, efficaces et mo­bilisatrices pour donner une expression collective » à la « colère qui gronde » , estime ce collectif constitué début octobre, qui regroupe syndicats, associations et partis de gauche. Les militants, citoyens et organisations du mouvement social sont appelés « à se regrouper partout en France, à former des collectifs pour créer les conditions d’une mobilisation unitaire et faire émerger des alternatives à la crise de ce système ».
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Dans un document de travail qui devrait être rendu public avant le G20, le collectif a rassemblé ses *« premières propositions »
pour « remettre la finance à sa place » et « répondre à l’urgence sociale et aux causes de la crise ». « Plusieurs mesures sont nécessaires pour y contribuer, et l’Europe, si les gouvernements le voulaient, est en capacité de les prendre et de peser ainsi sur la situation mondiale, même s’il est évident qu’il faut dans le même temps travailler à refonder l’ordre financier international et les institutions qui le portent (FMI, Banque mondiale, etc.) » . Les gouvernements sont ainsi invités, entre autres, à « limiter la liberté de circulation des capitaux et interdire toute transaction financière avec les paradis fiscaux », « établir une fiscalité progressive qui soit un réel outil de redistribution », « interdire les opérations et produits financiers les plus risqués » et « axer les transactions financières et les profits distribués aux actionnaires ».
Pour répondre à l’urgence sociale, le collectif préconise des « mesures immédiates » pour « protéger les victimes de la crise » . Il ­s’agit notamment d’interdire « les licenciements dans les entreprises qui font des profits » , d’encadrer les loyers et d’adopter un « moratoire pour les loyers impayés et les remboursements de crédits immobiliers » , d’interdire les expulsions de logement, de contrôler les prix des produits de première nécessité, etc. D’autres propositions sont destinées à modifier la répartition des richesses et à investir durablement dans un mode de développement écologique.
« La crise est à la fois économique, immobilière, alimentaire, sociale, écologique, constatent les organisations du mouvement social. ­L’ébranlement du capitalisme financier provoque des fluctuations brutales des prix agricoles, l’augmentation de la malnutrition, les faillites d’entreprises, l’accroissement du chômage. » . Le Bureau international du travail a récemment estimé que « la crise financière mondiale pourrait entraîner la perte de 20 millions d’emplois ».

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