Une seconde vie pour la Camif ?

Les ex-salariés du groupe niortais veulent fonder une nouvelle coopérative de consommateurs,
et rencontrent un large soutien.

Thierry Brun  • 11 décembre 2008 abonné·es

«Il y a peu de chance que tous les salariés soient reclassés », explique sans illusions Geneviève Paillaud, secrétaire du comité d’entreprise (CE) du groupe Camif, déléguée syndicale CGT, licenciée depuis la mise en liquidation de Camif Particulier le 27 octobre. Comme elle, près de 1 000 salariés se retrouveront sur le carreau, dont « 800 sur le seul bassin niortais, dans une zone au taux de chômage important. Et cela sans compter les emplois induits. Il faut multiplier par trois le nombre de licenciés potentiels » . Les ex-salariés n’ont pas baissé les bras : une association, l’Élan coopératif niortais, vient de voir le jour et a symboliquement nommé membre d’honneur Jean-Pierre Proust, petit-fils du fondateur de la Camif. Les statuts ont été déposés il y a quelques jours, et la mairie a mis des locaux à la disposition de l’association.

Quelque 160 ex-salariés et salariés de la Camif ont adhéré et se réunissent chaque semaine avec l’idée que la disparition de la Camif, coopérative de consommateurs créée en 1947 par le monde enseignant, ne peut laisser indifférents les acteurs de l’économie sociale et solidaire. « Il ne s’agit pas de remonter une Camif bis, mais les salariés sont attachés à ce modèle de coopérative. L’idée est de créer quelque chose avec de vraies valeurs coopératives » , explique Geneviève. Un appel « pour soutenir la refondation d’une nouvelle coopérative de consommateurs » a depuis été lancé par les ex-salariés de la Camif. « Parmi les mille personnes qui ont perdu leur emploi, il y a de fortes compétences. Certains ont déjà fait savoir qu’ils avaient des projets, on va partir de ce potentiel » , indique Jean-Pierre Martin, président de la chambre régionale de l’économie sociale, qui accompagne la démarche, à la demande des élus locaux [^2].

Rendu public le 1er décembre par Minga, association pour une économie équitable, l’appel intitulé « Des cendres de la Camif, faisons renaître une nouvelle coopérative de consom’acteurs pour une économie équitable » a déjà rencontré un grand succès. Outre des ex-salariés, la pétition nationale a recueilli les signatures d’organisations de commerce équitable, entre autres Andines et Artisans du monde Sens, d’Action consommation, d’Attac Littoral-Nord, du M’PEP, de la mutualité française de la Creuse et d’élus, dont Denis Baupin, adjoint au maire de Paris, Alain Lipietz, député européen, et Marie-Christine Blandin, sénatrice du Nord.

« Depuis des années, la direction de cette coopérative de consommateurs avait troqué les valeurs coopératives pour celles de l’ultralibéralisme, qui conduisent aujourd’hui le monde à la récession et la Camif à la ruine », dénonce la pétition, qui présente les grandes lignes de ce que serait un projet de refondation. « Il nous appartient de prouver que nos valeurs sont intactes et que nous ne sommes pas les dirigeants de la Camif », lance Geneviève.

[^2]: Selon La Nouvelle République du 4 décembre.

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