Le cercle s’ouvre et s’agrandit

La « ronde des obstinés », qui proteste contre la réforme de l’Université, a franchi le cap du millier d’heures. Elle veut désormais s’intensifier et s’associer à d’autres secteurs en lutte.

Erwan Manac'h  • 14 mai 2009 abonné·es

ils tournaient depuis le 23 mars. 1 000 heures que les enseignants-chercheurs, les personnels d’université et les étudiants se relayaient, jour et nuit, pour montrer leur désaccord au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en marchant en rond sur le parvis de l’Hôtel de ville de Paris. 1 000 heures et pas l’once d’une réponse du gouvernement. Le 4 mai dernier, les « obstinés » ont alors choisi d’interrompre leur ronde quotidienne et d’aller tourner « de façon intempestive » en d’autres lieux. Jeudi 7 mai, c’est au Panthéon qu’ils sont partis faire des tours. « Notre marche lancinante entre dans une dynamique centrifuge, explique un tract unitaire distribué par une enseignante de Sauvons l’université. Elle réapparaîtra plus massive […] et s’associera plus encore aux autres secteurs en lutte. »
Sous le regard des passants et des touristes, la « ronde des obstinés » suit ainsi une allure décidée. « Le décret qui modifie le statut des enseignants, prétendument réécrit, pose toujours problème, explique madame Dagois, professeur de musique. Il y a aussi le texte sur la masterisation, consacré à la formation des enseignants, qui s’élabore sans concertation en reprenant ce qui posait ­problème dans le premier décret. » Dans la ronde, on marche aussi pour redire son opposition à la Loi sur l’autonomie des universités (LRU), votée en août 2007. Parce que « tout ce qui nous est présenté par le gouvernement comme des réformes se résume à des économies de moyens » , tranche l’enseignante.

« On se bat pour une certaine idée de l’enseignement, explique Nicolas, étudiant en philosophie à Paris-VIII, pour une université en mouvement, avec une recherche et des enseignements libres, non pas orientés vers des intérêts économiques ou dictés par un pouvoir politique. »
« Changement de sens », hurle un universitaire posté au centre du cercle. Après quelques instants de confusion, les manifestants se retournent et reprennent leur marche et leurs conversations.

Un an après le mouvement étudiant contre la LRU, les enseignants sont en tête de cortège avec la même problématique. « C’est assez exceptionnel, poursuit Nicolas. Les professeurs sont en grève depuis des mois. Ça fait longtemps que ça n’était pas arrivé. » Pourtant, cette année, la mobilisation des étudiants fait un peu défaut pour grossir les cortèges. « Ils sont dans une telle précarité qu’ils sont paniqués à l’idée de s’investir dans un mouvement, estime une thésarde en littérature. Beaucoup travaillent pour financer leurs études, donc une longue grève pose un vrai problème économique. » « La question des validations des semestres nous préoccupe en priorité depuis la rentrée, explique Nicolas. Le gouvernement met la pression là-dessus et menace les étudiants d’avoir des diplômes bradés. On tombe un peu dans ce piège finalement. »

La ronde redeviendra permanente si aucune concession de fond n’est obtenue le 1er juin. Et, prévient le tract, « la ronde infinie des obstinés s’invitera dans le débat des européennes ».

Société
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