Le coup de l’ingérence

La façon dont le gouvernement a traité l’échec
de l’équipe de France est révélatrice de son cynisme.

Denis Sieffert  • 1 juillet 2010 abonné·es

Le mot est de Bernard Thibault et il résume tout : « Le président de la République a reçu l’un des vingt-trois grévistes de l’équipe de France. » Le 24 juin, alors que 800 000 manifestants défilaient dans les rues pour demander le retrait de la réforme des retraites, Nicolas Sarkozy n’a rien trouvé de plus urgent que de recevoir Thierry Henry, qu’une limousine élyséenne était venue chercher sur le tarmac du Bourget. Preuve qu’il n’y avait décidément pas une minute à perdre. Le Président en a profité pour faire une mauvaise manière à une ONG qui avait rendez-vous depuis plusieurs semaines. Le foot avant tout. La veille, Roselyne Bachelot avait tenu dans l’hémicycle un discours à la Finkielkraut stigmatisant les « petits caïds de banlieue » . Quelques jours auparavant, la ministre avait retrouvé les mots de Déroulède : la patrie, le maillot, l’honneur de la Nation. Les joueurs, s’était-elle vantée, en avaient pleuré. Joffre avant la bataille de la Marne. Au-delà du ridicule et de l’emphase, on voit bien l’embarras du gouvernement.

L’équipe de France devait permettre à la cote de popularité du Président de remonter. On se préparait à donner à voir une relation fusionnelle avec nos héros. C’est l’inverse qui s’est produit. D’où la tentation d’écraser les joueurs sous les reproches pour mieux s’en démarquer sur le mode « ces gens nous sont étrangers, ils n’ont rien à voir avec nous ». Et d’intervenir grossièrement dans les affaires de la fédération, pressant Jean-Pierre Escalettes, son président, de démissionner. Celui-ci a d’ailleurs obtempéré dès lundi. Finalement, le gouvernement aura traité cette Coupe du monde comme il traite les faits divers de banlieue : une stigmatisation, un limogeage, et des états généraux convoqués pour l’automne. Il s’en faut de peu que l’on ne nomme le futur entraîneur des Bleus en conseil des ministres, comme un vulgaire patron de radio ou de télé. Au point que le gouvernement a suscité la colère de la Fifa (Fédération internationale), qui a réaffirmé la nécessaire indépendance des structures fédérales.

Société
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