Nature à vendre

Du 18 au 29 octobre, à Nagoya (Japon), se tient la conférence mondiale sur la biodiversité. On y abordera la question d’un encadrement financier de la protection des écosystèmes.

Patrick Piro  • 14 octobre 2010
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Nature à vendre

Nagoya (Japon) sera le rendez-vous planétaire de la biodiversité du 18 au 29 octobre. Il s’agira de faire progresser un accord international lancé en 1992, la Convention sur la diversité biologique (CDB). Pour lutter contre la disparition accélérée des espèces, décrite comme la « 6e extinction majeure » de l’histoire de la planète ? C’est secondaire : les objectifs 2010, non atteints, ont été simplement reconduits pour 2020. Pour l’Union européenne, l’objectif était : « enrayer la perte de biodiversité » .

Deux autres objectifs de la CDB suscitent quant à eux bien des appétits : l’exploitation durable des ressources de la biodiversité ; leur accès garanti et le partage des avantages. Autrement dit : que les firmes puissent tirer parti des trésors génétiques de la nature sans trop léser les pays et les populations qui les détiennent.

Le commerce est bien au cœur des débats. Deux tendances s’affirment : d’une part, la présentation de la biodiversité comme ensemble de « services » rendus à la société, dont il convient de chiffrer la valeur ou le coût de la dégradation si l’inaction perdure. C’est l’objet du rapport « TEEB », présenté à Nagoya. Et, d’autre part, le recours à la marchandisation de ces « services » au prétexte de mieux assurer leur préservation, en dehors de tout encadrement pour le moment. L’une des pratiques est le « paiement pour services environnementaux » : par exemple, des paysans reçoivent une somme pour chaque hectare de forêt qu’ils n’auront pas déboisé.

À quel tarif ? Qui financera ? La nature étiquetée en rayon, nouveau continent à conquérir pour les marchés ! Mais il y a bien plus pervers : la compensation de dommages infligés aux écosystèmes. Une entreprise minière qui détruirait l’habitat d’une espèce irait se racheter en plantant des arbres ailleurs… Une pure monstruosité du point de vue écologique et biologique. Au nom d’une marchandisation sans tabou, on vend même déjà des produits financiers permettant de telles transactions. Et rien n’interdit ensuite d’imaginer l’équivalent des criminels échafaudages boursiers qui ont fomenté la crise de 2009. Un immense scandale de « subprimes biodiversité » équivaudrait à l’effondrement des écosystèmes de la planète…

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