Nucléaire : la France nerveuse

Très vives réactions à l’explosion d’un incinérateur de déchets nucléaires à Marcoule (Gard).

Patrick Piro  • 15 septembre 2011 abonné·es
Nucléaire : la France nerveuse
© Photo : . Aventurier/Getty Images/AFP

Un mort, quatre blessés dont un brûlé à 80 % : c’était le bilan humain provisoire, mardi dernier, après l’explosion d’un four d’incinération de déchets radioactifs dans l’usine Centraco de la société Socodei, sur le site de Marcoule (Gard). « C’est un accident industriel et non pas nucléaire », déclarait Éric Besson, ministre de l’Énergie : aucun signe d’augmentation de la radioactivité dans l’atmosphère, selon l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), ce que confirme le laboratoire indépendant Criirad.


Pour autant, une grande effervescence a régné pendant quelques heures, dans les milieux militants, politiques et au sein de la population. En quelques minutes, les sites d’information de la préfecture du Gard, de l’ASN ou du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) ont été saturés. Dans la journée, la valeur de l’action EDF chute un moment de 8 % pour terminer à -3,1 % après confirmation que l’accident semblait n’avoir eu que des conséquences limitées.

Il existe des raisons de s’alarmer. Centraco, qui incinère des déchets textiles et métalliques (pompes, outils, etc.) faiblement ou moyennement radioactifs, a déjà fait l’objet d’une vingtaine de remarques et remontrances de la part de l’ASN, touchant en particulier au non-respect des conditions d’exploitation.


Fin mai, c’est la perte, pendant quatre jours, de la détection de l’alarme incendie sur l’unité d’incinération, élément « important pour la sûreté », explique l’ASN (1), qui justifie le classement de l’incident au niveau 1 de l’échelle internationale de gravité. L’usine était donc dans le collimateur des autorités de sûreté, dont les interventions n’ont visiblement pas été suffisantes.


Par ailleurs, Centraco est située dans le périmètre du site nucléaire de Marcoule, qui accueille plusieurs installations bien plus dangereuses, notamment quatre réacteurs d’expérimentation en cours de démantèlement et une usine de fabrication de combustible MOX, extrêmement radioactif. Un accident survenant sur cette usine « mauvaise élève » pourrait les toucher.


Les propos lénifiants d’Éric Besson n’auront pas calmé les esprits, loin de là : la défiance est plus que jamais de mise envers l’industrie nucléaire et ses relais de communication. Chez les écologistes et une partie de la gauche, on réclame « la plus grande transparence ».


Ainsi, quelle est la situation radiologique exacte à l’intérieur de l’usine ? « Pas de rejet radioactif selon le CEA… Mais qui peut encore faire confiance à de telles déclarations », s’élève Denis Baupin, adjoint EELV au maire de Paris. Six mois après la catastrophe de Fukushima, le débat sur le nucléaire n’a rien perdu de sa vigueur en France.
Patrick Piro
(1) www.asn.fr

Écologie
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