Hollande, sans surprise

Comme attendu, François Hollande remporte les primaires socialistes et représentera le PS à l’élection présidentielle de 2012. Au siège du parti rue de Solférino, dimanche soir, le ton était à l’unité. Morceaux choisis.

Xavier Frison  et  Pauline Graulle  • 17 octobre 2011
Partager :
Hollande, sans surprise
© Photo : PATRICK KOVARIK / AFP

Martine Aubry la joue grand seigneur. Devant un mur de caméras et une sélection scrupuleuse parmi les 350 journalistes accrédités pour la soirée, la maire de Lille résume, laconique : « Je retourne à mes fonctions de premier secrétaire du Parti socialiste » . Puis, derrière l’éloge obligée au processus des primaires : « François Hollande incarne l’espoir des socialistes. L’heure est au rassemblement. » Une fois le speech terminé, le visage de la finaliste des primaires du PS ne trompe pas : mine défaite, regard perdu sur ses chaussures, le coup est manifestement dur à encaisser pour Martine Aubry.

Beaucoup plus détendu, moins solennel, Arnaud Montebourg adresse quelques minutes plus tard ses « sincères, amicales et chaleureuses félicitations » au vainqueur du jour. Parle, tout content, d’un « extraordinaire processus de modernisation du PS » , d’un « projet nouveau » , d’  « équipes , [de] dirigeants nouveaux » . Et se félicite de son « échange de lettres »  avec les deux finalistes des primaires : « Les lignes ont bougé, les programmes ont bougé, le PS a changé. » Voici donc « la nouvelle France »  : « Une force nouvelle est née et rien ne l’arrêtera » . Au tour de François Hollande maintenant de monter sur l’estrade, dans la bousculade, les flashes et les cris venus de la cour réservée aux militants. « Ma démarche est fondée sur la crédibilité, la justice, sur une grande espérance : offrir à la jeunesse de France une vie meilleure que la nôtre » , lance le tout frais candidat PS pour 2012. « La droite n’a rien à perdre, sauf ce qu’il lui reste, le pouvoir » , continue Hollande, avant d’asséner un des futurs slogans de campagne : « C’est le rêve français que je veux réenchanter ! »

Quelques heures avant ces interventions calibrées pour les directs TV et radios, entre 19 heures et 20h30, c’était aux seconds couteaux de s’exprimer, en badinant l’air de rien au milieu des journalistes désoeuvrés, réunis dans la cour de Solférino sous une immense tente blanche. Le meilleur dans cet exercice ? Jack Lang, un soutien « hollandais » qui n’a « rien à dire » et finit par lasser perches et micros après dix bonnes minutes de langue de bois. « C’est le PS qui sort vainqueur des primaires » , « une leçon de démocratie » , « plus la droite veut nous démolir, plus elle nous solidifie » . Et le bouquet final : « Plus rien ne sera jamais plus comme avant » .

Razzy Hammadi, secrétaire national du PS chargé des services publics et proche de Martine Aubry, prépare le terrain : « Dans tous les cas de figure, Martine Aubry sera là pour le PS. Et quel que soit le candidat, on sera tous rassemblé derrière lui » . Henri Weber, député européen et aubryiste, est envoyé sous la tente des journalistes un peu avant 20 heures. « Ce sera sans surprise » , prédit-il. Quel avenir pour la candidate malheureuse ? « Il faut qu’elle reste premier secrétaire, c’est un élément de la réconciliation… Les socialistes ont une grande culture de la réconciliation » , ajoute celui qui estime « qu’on a beaucoup exagéré » sur la division du parti en 2007.

Sous le chapiteau presse, guère de suspense. Les rumeurs courent. On donne à Hollande 53 %. Puis 54 %. Puis 55 %. « De toute façon, on aura vite oublié les scores , analyse un journaliste belge de la RTBF, qui couvre la politique française « qui passionne les Belges » depuis quinze ans. C’est comme au rugby : l’équipe de France fait de mauvais matchs, mais si elle gagne, on se souviendra juste qu’elle a gagné » .

Les résultats officieux officialisés, l’heure est au rassemblement, contraint et forcé pour certains. Gauthier Caron-Thibault, jeune conseiller de Paris « aubryiste », affiche la mine déconfite du bon perdant. « Ce qui est sûr, c’est l’équipe d’Aubry était très soudée , regrette-t-il en se dirigeant vers la péniche « Le quai » où une foule clairsemée de partisans de la maire de Lille s’est rassemblée pour regarder le premier discours télévisé du nouveau candidat. Je ne suis pas sûr que les partisans de Montebourg aient particulièrement envie de travailler avec les partisans de Hollande… ça va être le grand écart ». À la Maison de l’Amérique latine, où François Hollande et ses soutiens se sont rendus à pied pour finir la soirée, la fête sera calme : discours fleuve du nouveau patron, eau gazeuse, jus de fruit, cola et brownies. Quelques minutes auparavant, dans une harangue aux jeunes du PS réunis à Solférino, François Hollande a pu savourer sa victoire dans l’euphorie juvénile du moment. Et le candidat fraîchement affûté pour les joutes à venir de conclure : « Je vais m’arrêter de parler, parce qu’il est tard, et que vous avez sans doute faim. Faim de victoire ! »

Politique
Temps de lecture : 4 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Avec la VIe République, les unionistes veulent maintenir ce qu’il reste de la Nupes
Gauche 29 mars 2024 abonné·es

Avec la VIe République, les unionistes veulent maintenir ce qu’il reste de la Nupes

Une petite bande de députés s’investissent sur le sujet de la démocratisation de notre régime politique. Une campagne parallèle ayant l’objectif de maintenir les canaux de communication entre partis et de poser la première pierre pour 2027.
Par Lucas Sarafian
Dans le Nord, l’écologiste Marie Toussaint tente de lier fin du monde et fin du mois
Politique 21 mars 2024 abonné·es

Dans le Nord, l’écologiste Marie Toussaint tente de lier fin du monde et fin du mois

La tête de liste des Écologistes pour les européennes est venue assister au procès en appel des victimes de la pollution de la fonderie de Metaleurop et a rencontré un agriculteur de la région. Marie Toussaint tente tant bien que mal d’imposer ses thèmes.
Par Lucas Sarafian
Coupes budgétaires : pourquoi Emmanuel Macron attise la colère sociale avant les européennes
Budget 19 mars 2024

Coupes budgétaires : pourquoi Emmanuel Macron attise la colère sociale avant les européennes

La volonté du président et de Bercy de réduire la dépense publique fait craindre à l’exécutif un regain de mobilisation sociale, dans la foulée de la grève de la fonction publique du 19 mars.
Par Nils Wilcke
À Villepinte, l’insoumise Manon Aubry veut « déjouer le duel entre les macronistes et l’extrême droite »
Reportage 17 mars 2024

À Villepinte, l’insoumise Manon Aubry veut « déjouer le duel entre les macronistes et l’extrême droite »

Pour le lancement de leur campagne européenne, les troupes insoumises construisent un pont entre l’échéance de 2024 et la présidentielle. Jean-Luc Mélenchon, avant-dernier de cette liste, continue d’être ambigu sur ses ambitions.
Par Lucas Sarafian